V. Duluc : « Ces interdictions répétées sont une défaite morale, d’image, voire commerciale »

En lutte pour les droits des Ultras et ceux des supporters en général, les Ultramarines Bordeaux 87 reçoivent un nouveau soutien médiatique majeur, après celui de Pierre Ménès (Canal ). Dans un édito spécial, c’est en effet au tour de Vincent Duluc (journaliste à L’Équipe) de soutenir la cause des tribunes face à la répression.

« Les six minutes de temps additionnel de Bordeaux – Amiens (3-2) ont rappelé, samedi soir, que les supporters girondins avaient tendance, ces derniers temps, à rentrer chez eux plus tard que tous les autres. La semaine dernière, à Strasbourg (0-2), les ultras bordelais qui avaient bravé l’interdiction de déplacement et avaient été expulsés de la Meinau avaient chacun effectué jusqu’à dix-huit heures de garde à vue. Ils seront probablement interdits de stade, à terme, pour leur geste, et ils ont suscité un mouvement de solidarité, dans les stades de France, qui mérite d’être considéré. Ce n’est pas parce que les ultras se battent parfois les uns contre les autres qu’il ne faut pas les écouter quand ils se battent pour la même chose. Même les Marseillais, qui les détestent, ont soutenu les Bordelais durant cette semaine. Les ultras du pays n’ont pas toujours raison, et ils ont peut-être tort d’ailleurs de mélanger en ce moment la revendication de l’usage des fumigènes et puis la contestation des interdictions de déplacement : ils créent une confusion et affaiblissent leur propos sur le sujet le plus important. Le cœur du sujet est l’atmosphère de nos stades, et tout le bonheur du voyage.


Le déplacement est un rite essentiel dans le construction d’une culture et d’une appartenance. On ne supporte pas son équipe en prenant le métro. On traverse la France comme on découvre le monde, et ce sont les kilomètres, aussi, qui tissent le lien. (…) C’est beau la route. Il faut continuer à la faire pour aller voir des matches de Ligue 1. (…) Ces interdictions répétées sont une défaite morale, une défaite d’image, voire une défaite commerciale pour la LFP, qui tente, en vain, de vendre à l’étranger des images de matches avec une tribune vide chaque semaine, ou presque. Certains soirs silencieux, dans les stades de France éclairés mais sans feu intérieur et sans écho, avec un virage déserté ou avec un quart d’heure de grève, il revient l’idée que les supporters ont toujours été l’une des raisons pour lesquelles on aime le foot. »