Paulo Sousa : « Je veux qu’avec mes idées il y ait plus de monde au stade »

Une fois de plus très intéressant à lire/écouter en interview, l’entraîneur des Girondins de Bordeaux, Paulo Sousa, qui répond ici aux questions de Tribuna Expresso, précise encore sa vision romantique du jeu et son approche ambitieuse du football.

« Comment j’aime voir mes équipes jouer ? En étant des protagonistes, à tout moment du match, mais surtout avec le ballon. J’aime voir que mes équipes expriment tout leur contenu romantique ou poétique, individuel et collectif, afin de maîtriser l’adversaire et que cette maîtrise progresse avec l’espace et le temps. Mais tout cela nécessite certainement une importante intelligence tactique, donc nous cherchons à avoir une identité commune dans toutes les équipes, où cette base permet à l’individu de prendre des décisions plus rapidement, avant d’avoir le temps et l’espace, de sorte que l’expression poétique ça puisse être la base de l’individualité. C’est ça la base pour offrir au grand public, et en particulier à nos supporters, quelque chose qui leur permet de vivre une semaine stressante et de venir, après, au stade pour voir et ressentir des vraies émotions. En pratique, ce romantisme dont je parle, c’est être le plus longtemps possible dans la partie de terrain adverse, et même contre des équipes très bien entraînées, bien définies tactiquement, avec des espaces très réduits, et de pouvoir, grâce à une identité commune et au dynamisme du collectif, nous exprimer pour faire la différence dans le dernier tiers du terrain. Car la plus grande représentation du football est le but. Il en va de même pour la capacité de produire, pendant tout le match, beaucoup d’occasions de but afin que les passionnés viennent au stade. L’âme de tout football, c’est ça, et le fait d’avoir la plupart des stades toujours pleins est, pour moi, un exploit unique à essayer de réaliser. Je veux, avec le football et les idées du football que je cherche pour mes équipes, qu’il y ait plus de monde dans les stades.

Le plus dur à contrôler entre l’espace et le ballon ? L’espace. Car la technique ça a à voir avec les situations mécaniques que vous avez acquises. Mais je pense que nous nous sommes détournés, au cours de ces années nécessaires pour former le joueur afin qu’il contrôle la technique, de certaines choses ; comme les dribbles, qui disparaissent de plus en plus, dans tous les secteurs. De plus en plus, j’entends et vois des demandes de jouer en une ou en deux touches pour accélérer le jeu, ce qui se traduit également par une capacité de passe rapide, un jeu direct et des changements de direction. D’où la technique et le contrôle de la passe qui deviennent encore plus importants. Mais il faudrait aussi garder la possibilité de changer la vitesse du jeu à travers le dribble, en attaquant plus les espaces, savoir dribbler un ou plusieurs adversaire(s) pour se faire de la place.

Je pense que diriger une équipe est une bonne métaphore de la vie. Chez les jeunes, en formation, cela commence par la passion, mais ensuite on cherche rapidement à atteindre des objectifs concrets qui leur permettent de réaliser leur ambition de s’entraîner vers le football professionnel. Et plus on monte, plus c’est dur. Chez tous les jeunes avec lesquels je cherche à travailler ou à leur permettre de réaliser leur potentiel, des outils font défaut, notamment dans leur éducation à la notion de risque, à leur capacité à faire preuve de créativité en dribblant pour faire face à des défenses, à trouver vite des espaces et des zones différentes du terrain. Parmi les équipes que j’ai dirigées, la plus proche de mon idéal était la Fiorentina, et sans aucun doute. Nous avions alors des joueurs techniquement très avancés, et pour reconnaître l’espace, prendre la décision et s’exprimer ils étaient remarquablement rapides. Cela nous permettait donc de surmonter tout obstacle individuel, sectoriel ou bien collectif. Mais nous avons beaucoup failli dans la dernière partie du jeu, faut d’avoir plusieurs joueurs avec beaucoup de potentiel de finition. »