Dear mister President ! (Partie II)


IV) La communication
:

Voici l’un des points les plus importants, surtout lorsque le Président du FCGB est invité demain, à 19h30, à la grande messe populaire du football : le Canal Football Club. Face au grand prêtre Pierre Ménes, il devra faire taire les critiques répétées des supporters qui lui reprochent d’être malhabile face aux micros et aux caméras. Mais qu’en est-il vraiment de la communication de Jean-Louis Triaud ? Est-ce un point positif ou négatif de notre président ? Nous nous attacherons ici à étudier sa communication récente et celle au coeur de l’actualité.


Le titre de 2009
:

Voici une période d’obtention de bons points pour le chef de file du club au scapulaire. Loin des critiques actuelles à l’exception de quelques rares « anti-Triaud » devant l’éternel, notre président jouit alors d’une opinion très favorable concernant sa communication de l’époque. Souvent jugé comme réel amoureux du club et représentant de l’image bordelaise, son humour souvent grinçant fait sourire (presque) tout le monde. Son arrivée sur le podium du titre lors de la célébration aux Quinconces est presque saluée comme celle d’une rock-star ! Il y fait d’ailleurs son « show » devant un public conquis. Il est à son apogée. Et c’est pourtant là qu’il commet une erreur que beaucoup de supporters ne lui pardonnent pas aujourd’hui. Après que Marouane Chamakh, visiblement très « fatigué » par la longue nuit de fête, ait annoncé péniblement son souhait de rester aux Girondins un an de plus, Triaud profite de l’aubaine pour saisir le micro et annoncer: « Il reste ! Mais pas que Marouane… Ils restent tous ! ». La foule des Quinconces acclame le président sans se douter de la chute à venir.

 


Sa communication très récente sur le mercato et le public bordelais
:

Beaucoup de choses ont changé depuis 2009. La place des Quinconces, où 80 000 personnes s’étaient massées pour fêter un sixième tire de Champion de France, s’est vidée, tout comme le Parc Lescure qui semble bien loin de pouvoir rassembler à nouveau tout le peuple bordelais. La communication de Jean-Louis Triaud aussi a changé. Fini la stature de président apprécié pour son humour et sa gestion. Aujourd’hui, beaucoup l’habillent d’un costume de croque-mort du club. Les « extrémistes » ont changé de camp. En 2009, ils étaient les rares chez qui notre président ne suscitait aucune sympathie; en 2013, c’est plutôt ceux qui le trouvent toujours drôle et compétent qui forment la minorité silencieuse au milieu des critiques.

Début septembre, le président lâche une « bombe » dans le journal Sud Ouest qui va constituer, pour beaucoup de passionnés des Girondins, la goutte d’eau qui fera déborder le vase. Après un mercato estival rigoureux que la majorité des supporters juge comme « manquant d’ambition », le président les qualifie de « faux-vrais supporters qui donnent des leçons » :

« Le président des Girondins s’insurge d’abord face aux critiques dont il est l’objet chaque saison. « C’est un principe récurrent », dit-il. « Ce qui est amusant, c’est qu’en 99, on joue un match amical à Lormont et il y avait une banderole qui disait « on veut une équipe ». Or, on a fini champions… J’entretiens de bonnes relations avec les vrais supporters. On discute, on n’est pas d’accord mais on échange. Mais il y aussi les faux-vrais supporters qui donnent des leçons, qui s’arrogent un droit de s’immiscer dans la vie du club et qui se permettent de critiquer et d’expliquer qu’il faut faire différemment. Je leur réponds que sans argent, on ne gagne pas. Aujourd’hui, avec nos 65 millions d’euros de budget, comment concourir contre Paris et ses 400 millions ? »

Sud Ouest du 07/09/13.

 

Dès lors, beaucoup de supporters se sentent insultés, bafoués par leur club. Cela n’a rien d’anormal. Le club est dans l’impasse sportivement et le qualificatif de « crise » est même employé, certains parlent même de descente en Ligue 2. Jean-Louis Triaud est-il allé trop loin ? Est-il vraiment un président injurieux et illégitime comme certains le disent ?! Nous avons décidé de réaliser une petite recherche dans un but comparatif, basée sur la communication des présidents de clubs en crise.

Un comparatif très instructif !

Quelles relations les autres présidents des clubs en crise entretiennent-ils avec leurs supporters ? Nous avons décidé de scruter la communication de deux « personnages » qui vivent eux-aussi des « lendemains qui déchantent » après une période faste : Jean-Michel Aulas (Lyon, actuel 14ème de Ligue 1) et Louis Nicollin (Montpellier, actuel 8ème du championnat de France). Ces deux exemples nous semblent pertinents car ils présentent les mêmes caractéristiques que celles applicables aux Girondins. Deux clubs champions dans un passé récent et deux présidents critiqués par les supporters. Comment réagissent-ils ?

1) Aulas, le flingueur de Twitter :

Jean-Michel Aulas est énervé, comme son homologue bordelais et il le fait savoir en public, et régulièrement, via son compte twitter. Énervé par des supporters qui, selon lui, n’ont pas apporté le dixième de ce qu’il a fait pour l’OL. Des « faux-vrais » supporters en somme. Il n’hésite pas à les interpeller et à se montrer « virulent » par le biais du réseau social, à tel point que le site d’Eurosport a décidé d’y consacrer un article, en forme de florilège. « Rien comprendre au foot », « ridicule », « bêtise » ou encore « incompétence », le boss lyonnais ne s’embarrasse pas avec la politesse ou la courtoisie. A côté, Triaud et ses « faux-vrais supporters » fait figure de débutant en ce qui concerne le manque de respect aux fans.

En ce qui concerne la gestion de ses derniers mercatos, le président rhodanien ne semble pas convaincre son peuple plus que Jean-Louis Triaud. Lui aussi a connu des bides plus ou moins retentissants, et à un autre prix que les Girondins (même si le palmarès de l’OL est impressionnant sur la dernière décennie). Abdul Kader Keita, Jean II Makoun, Mathieu Bodmer, Giovanni Elber, John Carew, Nilmar, Benoit Pedretti ou encore…Yoann Gourcuff la liste est longue ! Pourtant, ce dernier se verrait proposer une offre de prolongation. Les supporters lyonnais enragent. Que dire aussi des cas Jimmy Briand et Bafétimbi Gomis, déclarés indésirables cet été puis réintégrés comme si de rien n’était. Concernant le dernier nommé, les supporters de l’OL ne comprennent pas la communication de Jean-Michel Aulas. Il faut dire que l’homme fort de l’OL a pour le moins été vraiment très flou et bien retourné sa veste.

Le 23 juin dernier, Aulas publiait deux tweets annonçant son envie de voir l’attaquant quitter le club aux sept titres consécutifs:

Le joueur a même été écarté du groupe, traité comme un indésirable. Mais tout à coup, le 31 août, lorsqu’Aulas comprend qu’il ne vendra pas son buteur, ses plans changent diamétralement et il vend son capitaine (tiens, tiens!) Lisandro Lopez au Qatar pour une somme dérisoire (6 millions d’euros) comparée à celle qu’il avait dû payer pour l’engager (24 millions d’euros). Gomis retrouve alors de l’intérêt et ressort du placard comme si rien ne s’était passé…

Malgré ces différents atermoiements, Aulas bénéficie toujours, nationalement, de l’image d’un grand président, basée sur son palmarès. Et ce même lorsqu’il s’en prend à ses supporters et qu’il semble dépassé sur le front des transferts. Une situation comparable à celle des Girondins avec, en prime, peu de jeu, des résultats inquiétants et une 14ème place due à deux victoires lors des deux premiers matchs. En Europa League, les ambitions de victoires de l’an passé (Aulas claironnait que l’OL était un des grands favoris) ne sont pas ressorties, loin s’en faut (deux matchs nuls consécutifs et une qualification compromise).

2) Nicollin, l’homme au club supporté par des « imbéciles et des abrutis » :

« Ils sont cons ces Montpelliérains hein ? Ils sont vraiment cons ! » Un petit conseil aux supporters bordelais qui seraient tentés de quitter le navire Marine et Blanc, excédés d’être qualifiés de « faux-vrais » supporters, qu’ils n’aillent pas supporter Montpellier. Louis Nicollin est fidèle à sa légende, il ne fait pas dans la dentelle quand il s’agit de parler de ses supporters. La preuve avec l’entretien vidéo enregistré il y a une dizaine de jours par le site de L’Équipe, où, le moins que l’on puisse dire, c’est que le fan Montpelliérain n’est pas montré sous un angle très glorieux. Le brave « Loulou » remet clairement en cause l’intelligence de ses supporters et leur amour pour le MHSC, déclarant qu’ils sont inutiles, même en venant au stade, et que jouer devant 5 000 fidèles, réellement amoureux du maillot  héraultais, lui ferait plus plaisir. Les « attaques » de Triaud paraissent bien ridicules à côté de ça !

Concernant sa gestion des mercatos, là aussi, les supporters sont sceptiques. Beaucoup voyaient leur club surfer sur la dynamique du titre de Champion de France pour bâtir une équipe destinée à jouer les premiers rôles… Là aussi, Nicollin a tranché, lui qui a déclaré sur les ondes d’RMC « être prêt à s’affaiblir quitte à descendre en National » (« Luis Attaque », janvier 2013). Pour ceux qui critiquent l’ambition girondine du président Triaud, le message doit interpeller. Quant aux bons joueurs susceptibles de quitter son club, le président héraultais n’en a, selon ses propres mots, « rien à branler ».

Conclusion :

Lorsque les temps sont durs, l’herbe semble souvent plus verte ailleurs. Si la communication de Jean-Louis Triaud sur les performances actuelles de l’équipe et envers les supporters est sans doute assez maladroite et qu’elle peut froisser certains, elle est loin d’être la plus incendiaire de Ligue 1. La communication actuelle du président lui vaut, quand même, globalement un (gros ?) point de malus, au vu du grand nombre de supporters se sentant floués actuellement. Rappelons qu’une pétition et un site ont même été lancés par Christian Alvarez, un fan du FCGB militant pour le renouveau de ce dernier, preuve que les choses vont tout de même mal.