Stéphane Martin : « J’ai eu de la chance de démarrer par le meilleur en commençant comme président des Girondins de Bordeaux »

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« Travailler encore dans le football ? Oui, c’est mon souhait »

« Si je me vois encore dans le football ? Oui, c’est mon souhait. Je suis toujours un passionné de football et j’ai adoré travailler dans ce milieu-là. Parfois, quand on est passionné et qu’on arrive à l’intérieur, on peut avoir de mauvaises surprises… mais moi je n’ai pas été déçu. Maintenant, je sais que les places dans le monde du football sont chères, et en plus moi j’ai eu de la chance de démarrer déjà par le meilleur en commençant comme président des Girondins de Bordeaux ; donc cela rend exigeant pour la suite. Mais je crois que le football restera une passion incurable pour moi, et vous devez le savoir ce que c’est que d’être passionnés (sourire)… Si je vise uniquement un poste de président dans un autre club ? Dans le football, je ne vous cache pas que participer au sportif est ce qui m’intéresse le plus… plutôt que de vendre des maillots par exemple (sourire). Mais dans le domaine du purement sportif, je ne suis pas vraiment crédible par rapport aux techniciens et aux joueurs pour m’impliquer davantage… Alors donc, oui, travailler en tant que président ça me semble le mieux. Mais on verra bien. Si je pense à devenir un agent ? Non. Mais je trouve quand même que contrairement à ce que disent les médias de ce métier il y en a beaucoup de très bien des agents. Après, passer d’un travail de président à celui d’agent, je pense que ce n’est pas l’idéal et qu’il y a trop de risques de conflits d’intérêts. Et surtout en changeant aussi rapidement de l’un à l’autre. Donc, non, cela ne fait pas partie de mes objectifs. »

Le(s) bilan(s) de sa présidence des Girondins de Bordeaux

« Président des Girondins, c’est un job assez intense, très exigeant, et pas de tout repos, encore plus quand les résultats sont compliqués. Mais c’est quelque chose de très obsédant et prenant, surtout quand les résultats ne sont pas là. Donc maintenant que c’est terminé, oui, on souffle et on recharge les batteries, en faisant à nouveau des choses que je n’avais plus le temps de faire. Après ma prise de fonctions, les 6 premiers mois ont été bons, à la fois la fin de la saison 2016-2017, où on finit 6ème après une belle remontée, et les premiers mois de 2017-18. On pense faire un bon mercato d’été 2017, avec beaucoup d’arrivées et puis des départs, les choses se passent bien au départ en championnat… et puis la lumière s’éteint tout d’un coup. Et là, tout va très vite… Quand vous enchaînez les défaites, vous êtes un peu comme un boxeur sonné, vous prenez les coups et on se demande alors contre qui on va gagner. Au bout d’un moment, c’est vrai qu’on ne sait plus par quel bout prendre le souci et cette période-là a été très dure à vivre pour tout le monde au club. Mais finalement, on a su rebondir. Comment j’ai vécu le mercato d’été ? C’est forcément la période où, en tant que dirigeant, on a le plus d’impact sur le sportif. Car après, quand la saison commence, les choses sont plus entre les mains des techniciens et des joueurs. Mais c’est exaltant de vivre ça, car on décide, à la fois sportivement et économiquement – car c’est une composante très importante et que de plus en plus de clubs français basent beaucoup leur modèle sur ça, avec notamment le trading de joueurs comme on dit -, de l’avenir d’un club sur une saison. C’est une période qui est parfois très stressante, mais parfois, quand les affaires se passent comme vous le voulez, c’est aussi très positif. »

Pourquoi le club a été si patient avant de se séparer de Jocelyn Gourvennec

« Avec Jocelyn Gourvennec, il y a eu deux choses qui nous ont poussé à continuer : la conviction personnelle – mais peut-être mauvaise – d’avoir un coach de qualité, à la fois professionnellement, humainement et puis aussi intellectuellement, mais aussi cette envie de ne pas sur réagir à des résultats à court terme, en se disant que ça allait être une expérience qui allait faire grandir tout le monde. Et, en plus, changer d’entraîneur, ce n’est pas chose neutre financièrement, et pour un club ce n’est pas une politique de changer d’entraîneur souvent. On assume d’avoir maintenu Jocelyn Gourvennec aussi longtemps et de lui avoir donné du temps, en étant tolérant face aux mauvais résultats, par rapport à tout son travail et son courage. Malheureusement, il arrive un moment où on n’a plus le choix, même si on sait que ce n’est pas original et que ça reste une décision dure à prendre. Mais il fallait changer quelque chose et on ne pouvait pas changer tout l’effectif, ce qu’on avait déjà en partie fait à l’été 2017. Alors on s’est séparé de Jocelyn, en sachant que ça pouvait marcher ou pas avec le prochain entraîneur… C’était un moment vraiment très difficile, humainement d’abord, et économiquement aussi. »

Gustavo Poyet ? Je n’ai pas envie de polémiquer

« La façon dont cela s’est terminé avec Gustavo Poyet ? Pour moi, ça a été une surprise et surtout une vraie déception. Mais je n’ai pas envie de polémiquer sur ça et de reparler de ce sujet dont on a déjà assez parlé. Avec Gustavo Poyet, il y avait peut-être moyen de construire quelque chose sur la durée, et on ne lui enlève aucun mérite quant aux résultats et puis à la qualification acquise en Coupe d’Europe. Mais… c’est comme ça… Alors, on préfère plutôt retenir le positif. »

À propos des choix de recrutement (Nicolas de Préville, notamment)

« On est obligé de tenir compte de l’avis du coach dans un recrutement. C’est quelque chose qui ne peut pas être fait autrement. C’est une décision collective. Il faut aussi assumer que, quand on a un coach en qui on a confiance, on l’écoute encore plus. Ce serait facile de dire : ‘Les mauvais joueurs ce sont les choix du coach, les bons choix ce sont les miens !’. Après, il y a un équilibre à trouver, comme on ne peut pas recruter des joueurs dans le dos d’un coach. Et à l’inverse, tous les coachs du monde pensent au match d’après et peut-être moins à un horizon lointain sur 4-5-10 ans. Ce que font un directeur sportif et un président pour leur club. Dans le cas du mercato 2017, je ne pense pas qu’il y ait eu de caprice de la part de Jocelyn Gourvennec. Il y a eu des concertations, des choix collectifs. Tous n’étaient pas bons, mais il y a eu aussi des bons choix. Mais c’est vrai qu’il n’y a pas le même horizon de vue entre l’entraîneur et le président / directeur sportif. »

Le football féminin en France et aux Girondins de Bordeaux

« La fin de saison 2017 (sauvetage à la dernière journée, ndlr) est un miracle, sachant que le match nul à Paris est conjugué avec une défaite à domicile de Saint-Étienne contre Guingamp, et que le match d’avant on gagne à Marseille dans le temps additionnel. Et pour tout vous dire, à 4-5 journées de la fin je pensais qu’on était relégués puisque j’avais fait une gaffe avec une joueuse en lui disant ‘C’est pas grave, on repartira’. Mais oui, cette fin de saison est un tournant puisque si on retourne en Division 2 on doit repartir sur un autre cycle et on ne peut pas faire venir des joueuses importantes. L’histoire du football féminin à Bordeaux est très récente : la fusion avec Blanquefort se fait en août 2015, et pour la première saison jouée en D2 la montée n’était pas programmée. Ensuite, la première saison en D1 se termine par un miracle, et tout va très vite. Cette saison, on est sur notre 4ème saison, et on a déjà une équipe dans le premier tiers de classement, grâce à des joueuses de haut niveau. Cela se fait petit à petit, avec des gens qui ont cru dès le début en ce projet, que ce soit Ulrich Ramé ou Françoise Brunet. Et aujourd’hui on a une équipe qui tient la route et qui jouera les premiers rôles. Le football féminin est en plein boom. Aujourd’hui, c’est déjà la 4ème fédération de sport féminin je crois, avec plus de 100.000 licenciées. Ça m’avait frappé aussi, mais par exemple la finale de la Ligue des Champions Lyon – PSG avait eu plus de téléspectateurs que la finale féminine de Roland Garros, c’est une statistique qui claque je trouve. On en est qu’au début, c’est un sport agréable à suivre avec un niveau élevé et des caractéristiques évidemment un peu différentes que les garçons avec moins de contacts physiques, moins de vitesse, mais ça peut être aussi plus agréable pour apprécier le jeu. Cette saison, la diffusion de tous les matchs en intégralité et en direct a été lancée. On va avoir la Coupe du Monde en France à la fin de la saison, le football aux JO aussi, qui soulève plus d’enthousiasme chez les filles que chez les garçons. On en est qu’au début, mais c’est normal qu’un club comme les Girondins s’investisse dans cette discipline. Pour terminer, je rappelle qu’on a déjà entre 150 et 170 licenciées aux Girondins : donc dans la pratique de loisirs, le foot féminin progresse bien ! »