Les avis de Poutou, Hurmic et Florian sur le FCGB, King Street et le stade

France 3 Nouvelle-Aquitaine a organisé, ce jeudi 25 juin, le débat de l’entre deux tours des élections municipales de Bordeaux (second tour ce dimanche 28 juin). Les trois candidats encore en lice, Philippe Poutou, Nicolas Florian (maire sortant) et Pierre Hurmic ont chacun expliqué leurs idées et débattu sur divers sujets, dont… les Girondins de Bordeaux et leur état actuel, avec des conflits de partout et des supporters en colère, ainsi que l’avenir des Marine et Blanc.

Les discours, complets, de chacun (dans l’ordre des prises de parole) !

POUTOU : « Déjà, je ne sais pas si les Girondins seront le sujet le plus chaud, car on peut considérer que par rapport aux problèmes sociaux on est sur des choses peut-être secondaires. Maintenant, ce n’est pas quelque chose qui n’a aucune importance. Nous, on est solidaires des supporters, des Ultras, de ceux qui sont en Virage et qu’on connait. Samedi, ils manifestent et on est en soutien de leurs revendications, mais nous ce qu’on a envie de dire c’est que ça fait quand même très longtemps qu’on a un foot et un sport professionnel quand même bien déconnecté de tout ce qui peut-être populaire. On voit l’argent qui est brasé… Nous, on est contre le sport pognon, il y a trop de pognon là-dedans, voilà, donc ça c’est un problème. Aujourd’hui, des gens n’arrivent pas à se loger, à se soigner, et il y a des dizaines de millions dans des clubs comme ça. Ce n’est pas normal. Les actionnaires n’en ont rien à foutre de la questions sociale, eux ils sont là pour se faire du pognon, donc les actionnaires d’aujourd’hui ne sont ni pires ni meilleurs que ceux d’avant, M6, ou même que Claude Bez, avec la triche, la délinquance, les magouilles etc.

Le foot, c’est vachement populaire – ce comme d’autres sports -, et ce sont les milieux populaires qui y vont et s’endettent pour payer leurs places et leurs abonnements ; donc on peut être supporter, aller au stade… Mais on voit que les directions des clubs sont à l’image du capitalisme : faire de l’argent sur le sport. Il faudrait donc essayer de mettre ça dans un truc plus global, au regard des questions sociales qu’on a envie de poser.

Enfin, les grands projets de PPP, nous on les considère inutiles et même nuisibles, car ça enrichit le privé mais ça coûte très cher à la collectivité, donc on est contre ça. La discussion, c’est que faire de l’argent, du budget, quand on en a… Au lieu de le dépenser dans un grand stade qui coûte cher, on avait le stade Lescure – oui, je reste à ce nom-là, je ne dis pas Chaban-Delmas -, qui suffisait largement. Aussi, en général, on pense que dans la gestion des Girondins de Bordeaux il devrait y avoir un droit de regard pour les supporters, pour ceux qui fréquentent le stade, avec même un pouvoir de décision pour les groupes de supporters, afin que ce ne soit pas toujours les actionnaires qui décident de tout. Mais dans la société, tout est comme ça, et nous on est contre ça, car on veut que la population s’organise d’elle-même et qu’elle ait un pouvoir de décision sur la gestion d’un budget et sur ce qui la concerne directement dans ses propres quartiers. »

HURMIC : « Il y a deux choses : d’une part le club des Girondins et de l’autre le grand stade. Sur le stade, j’ai été hostile d’entrée au Partenariat Public Privé et je proposerai une sortie. Pour le club des Girondins, on nous a proposé, le 12 octobre 2018, à la Métropole, avec un débat, de nous positionner sur le rachat du club par un fonds de placement américain, King Street, représenté alors par Monsieur DaGrosa. J’ai fait partie des rares élus qui ont voté contre ce rachat en disant qu’il était hors de question que notre club des Girondins, un joyau, une pépite de presque 140 ans, soit laissé à saisir par un fonds de pension américain, un fonds spéculatif comme ont dit beaucoup de spécialistes. J’ai pensé, d’entrée, que c’était une ânerie, d’autant plus que quand on a demandé à Monsieur DaGrosa il n’avait aucun projet sportif, car la seule chose était la recherche du profit à court terme.

Aujourd’hui, les fonds de pension américains cherchent un retour rapide sur investissement, mais actuellement ça prend du temps. Il est question que King Street se désengage, et je pense qu’ils attendent le lendemain des élections pour annoncer publiquement qu’ils se désengagent. Ils ont déjà vendu les joueurs qu’il fallait pour gagner de l’argent, fait du business, et le président des Girondins, Monsieur Longuépée, s’est mis à dos – ce qui est un exploit – les supporters du club, dont les Ultramarines, qui sont un groupe très acceptable et enthousiaste mais il les a menacés de poursuites pénales. Il y a quand même un malaise et c’est pour ça que, pour moi, le rôle du maire est de taper du poing sur la table, de rencontrer King Street et de leur dire que ça ne peut pas durer, car l’ambiance actuelle est délétère. Je pensais que le problème pouvait se régler avant les élections, mais on va attendre après. En tout cas, si je suis maire, je n’écrirai pas simplement une lettre à King Street, mais je demanderai à rencontrer le PDG de King Street, et je lui dirai qu’il nous a trompés, qu’il ne s’intéresse pas du tout au football, et qu’il faut qu’il nous propose des solutions, dont surtout celle de remplacer Monsieur Longuépée comme président du club. Monsieur Longuépée n’a plus la confiance des supporters, il faut le remplacer et mettre quelqu’un qui sera accepté. Cela, c’est pour le court terme. Pour le long terme, ce sera plus compliqué…

Après, sur le stade, actuellement géré par la société SBA, il faut casser le PPP qui s’étend jusqu’en 2045 et sur lequel j’étais résolument contre – les faits m’ont d’ailleurs donné raison, car il est surdimensionné -, et mettre en vente le stade Matmut Atlantique, qui fait perdre 3 M€ par an à SBA. Il ne faut pas, en tout cas, que les Bordelais payent ce fiasco pendant 30 ans. »

FLORIAN : « Sur le stade, Monsieur Hurmic ne connait pas le dossier et il avance des solutions totalement inconsistantes. Casser le PPP coûterait 80 M€. Et si on devait vendre le stade il serait légitime que la ville rembourse tous ses partenaires, à savoir l’État – 28 M€ -, la région – 15 M€ – et Bordeaux Métropole – 15 M€ -, donc ce serait un fiasco financier, alors que ce stade est celui qui a coûté le moins cher en France et qui coûte 2.3 millions d€ par an de charges nettes à la ville et à l’agglomération. Ensuite, sur les Girondins, ça me fait beaucoup de peine la situation actuelle. Monsieur Bez m’a fait vibrer à l’époque de Giresse, de Tigana, d’Aimé Jacquet… Ça a peut-être mal terminé, mais la demi-finale de Coupe d’Europe contre la Juventus j’y étais et j’avais des larmes dans les yeux car j’étais gamin alors. Les Girondins, ça appartient à la ville, donc c’est un sujet qui me fait beaucoup de peine. Après, on sort d’une crise sanitaire qui a fait 30 000 morts en France, on est dans une crise alimentaire et une crise sociale et économique, donc je pense qu’on peut attendre le lendemain des élections pour traiter le sujet des Girondins. Et je le traiterai le lendemain des élections. J’ai écrit à King Street, je les ai invités à une rencontre, et je les ai convoqués. Ils seront convoqués la semaine prochaine, avec tous les acteurs, car il y a là un vrai problème de gouvernance dans ce club. Maintenant, je ne suis pas actionnaire, donc je ne réclame pas des têtes car je ne suis pas un coupeur de têtes. Moi, je vais convoquer tout le monde. Aussi, il y a ce sujet des fonds de pension, avec cette espèce de dégradation du système, mais en 2018 on n’avait pas le droit de s’opposer car M6 allait se désengager… Enfin, il y a quand même un grand sujet sur la financiarisation du modèle sportif, ce que l’on ne retrouve pas dans le rugby d’ailleurs. Mais dans le football, il y a un enjeu européen et national, et il faut que les pouvoirs publics s’en saisissent, car avoir ces fonds vautours qui viennent faire de la spéculation pour après repartir est un problème. Moi, je demande à King Street des engagements précis : Ou ils restent dans la durée et on s’organise ensemble, ou ils s’en vont et on trouvera un repreneur. Je suis déjà sollicité par des repreneurs et je ne me fais pas de soucis sur l’avenir des Girondins. Si King Street s’en va, dès le lendemain, j’aurai plusieurs propositions sur mon bureau, et je les ai déjà eues, pour reprendre le club dans de bonnes conditions. »

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