Ménez, c’est quoi le problème ?

Il n’est pas en forme ?

« Je dois faire plus. Je n’ai besoin d’entendre personne, je suis le premier à le dire. Je savais que ça allait mettre un peu de temps
après une année compliquée avec mes problèmes de dos. À chaque fois, je
sentais que j’allais passer un cap, mais je me suis fait mal (cuisse puis
genou, NDLR). C’est embêtant mais ça fait partie du truc. Je vais aller crescendo. »

Pour le coup, tout est dit par l’intéressé lui-même, dans Sud Ouest il y a une semaine. Plutôt épargné par les blessures depuis le début de sa carrière, le joueur formé à Sochaux a connu une très longue absence la saison dernière, restant quasiment 10 mois de côté à cause d’une blessure au dos. De plus, depuis le début de cette saison, alors que sa préparation estivale, faite avec le Milan AC puis les Girondins, avait déjà été tronquée par sa fameuse blessure à l’oreille, Ménez a connu deux autres pépins physiques, à la cuisse puis au genou. Des problèmes de courte durée, mais après 3 mois de compétition il n’a pas encore pu retrouver le rythme après lequel il court pour être performant. Et tant qu’il ne l’aura pas, en plus d’un équilibre personnel, il sera dur d’attendre qu’il retrouve son meilleur niveau.

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Il n’est pas à son poste ?

L’un des points épineux du débat. Doté de qualités techniques au-dessus du lot et d’une aisance dans le dribble et l’accélération, l’ex monégasque, parisien, romain et milanais, a plus souvent été utilisé comme un joueur de couloir, et ce dans différents schémas de jeu. Pourtant, tant lors de ses débuts à Sochaux ; et notamment pour son triplé express contre… Bordeaux ; que durant de ses meilleurs passages monégasques, parisiens (16 passes décisives et 9 buts en 42 matches lors de la saison 2011/12) et milanais (16 buts et 4 passes décisives en 34 matches lors de la saison 2014/15), c’est bien dans l’axe qu’il a été le plus efficace. En tant qu’attaquant donc. Ainsi, s’il n’est pas vraiment un buteur, et que sa faible participation au pressing à la perte de balle l’empêche sans doute de jouer seul en pointe, le faire jouer devant, dans un 4-4-2, n’a rien d’une ineptie et apparait même logique. Bien que, selon les circonstances, jouer sur la polyvalence de l’ancien international tricolore (24 sélections pour 2 buts et 2 passes décisives) puisse s’avérer judicieux.

« Le fait de pouvoir jouer en attaque, ça a été un plus. C’est la
position que je préfère et, je pense, ma meilleure : aller en
profondeur, décrocher, j’adore
. J’ai souvent joué sur les côtés et
c’est peut-être ce qui m’a empêché d’aller plus haut dans ma carrière.
Je n’ai jamais été un mec qui veut tirer de n’importe où au lieu de
faire la passe. On m’a collé l’étiquette d’individualiste car je
faisais parfois le dribble de trop. Mais ce n’était pas car je ne
voulais pas donner le ballon
. J’ai presque autant de passes décisives que de buts dans ma carrière… » analysait Ménez en personne, encore dans Sud Ouest, mi-septembre. Et quand on creuse un peu en remontant le fil de sa carrière, on se rend rapidement compte qu’il dit vrai.

Il n’est pas gérable ?

Voilà le sujet qui revient le plus avec lui et qui fait qu’il énerve tant de monde. Réputé caractériel, capricieux, immature, égoïste ; et critiqué pour son état d’esprit par d’anciens coaches et des observateurs lui reprochant d’être capable de pourrir un vestiaire ; le nouveau porteur du N°7 au FCGB est également défendu par bon nombre de personnes, appréciant ce qu’il est, qui serait donc bien loin des clichés, faisant de lui un  un « incompris ». Ne le connaissant pas plus que ça, sinon à travers les avis des autres, on ne va pas faire ici le procès de sa personnalité. On constate juste que les cas concrets et connus de dérapages autour de lui sont, somme toute, peu nombreux, et qu’ils datent d’il y a quelques années, notamment ses suspensions pour de mauvaises attitudes envers les arbitres. Ne s’étant pas entendu avec Vincenzo Montella à la Roma, le coach à cause de qui il a quitté le Milan, Ménez n’a, visiblement, jamais « pourri » de façon évidente un vestiaire. Il avait même su, à ce qui se dit, se faire apprécier de Francesco Totti ou encore de Zlatan Ibrahimovic, mais également de Carlo Ancelotti, par exemple. Et depuis qu’il est à Bordeaux, pas de traces ni d’échos, non plus, par rapport à des comportements défrayant la chronique. Au contraire même, si on en croit Jocelyn Gourvennec, le coach qui l’a convaincu de venir à Bordeaux et pense pouvoir le canaliser pour le relancer au mieux.

Ce qui agace, au final, ce sont « juste »… des comportements sur le terrain : une certaine nonchalance, des gestes d’humeur et des mimiques d’énervement, le fait de ne pas forcément être des plus souriants, ou bien… sa coupe de cheveux. Que tout cela puisse énerver le public ou, pire, ses coéquipiers, pourquoi pas, mais il ne sera ni le premier ni le dernier à être ainsi et, pour un bad boy annoncé, avouons qu’on a quand même vu… largement pire. Pas forcément de quoi stigmatiser outre mesure « l’ingérabilité » du bonhomme donc, d’autant plus que ce genre de remarques disparaissent comme par magie quand le sportif va bien, alors que les traits de caractère sont pourtant toujours là car tout simplement dans la nature du personnage. Alors, pour une fois qu’on a, à Bordeaux, un joueur qui n’est pas lisse, tant qu’il ne « pourrit » pas réellement les choses ; l’âge (29 ans) et la paternité aidant certainement à ne plus franchir la limite ; on ne lui en voudra quand même pas d’être un compétiteur.

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Verdict ?

Auteur, pour l’instant, de 2 buts et d’1 passe décisive en 10 matches (dont 9 titularisations) avec les Girondins de Bordeaux, où il a signé jusqu’en 2019, Jérémy Ménez n’est encore ni une réussite, ni un échec. Après 10 rencontres, il est de toute façon quasi impossible de juger quoi que ce soit. Il faudrait surtout savoir à quoi on s’attendait avec lui… Et si certains, supporters comme médias, ont sérieusement  pris comme comparaison la « résurrection » inattendue (ou plutôt pas attendue à ce point) d’Haterm Ben Arfa à Nice la saison dernière, l’erreur est peut-être surtout dans cette enflammade. Du côté de Gourvennec, il n’y a, en tout cas, pas eu d’effets d’annonce de ce type.

« On avait envisagé l’idée d’avoir un joueur devant qui ait des références, qui soit expérimenté, et qui connaisse bien la Ligue 1, même s’il vient de l’étranger. On voulait surtout un leader d’attaque.
Jérémy est un joueur très créatif, et comme tous les joueurs créatifs
il est extrêmement sensible, il a besoin de se sentir bien dans le club
où il est, avec ses partenaires et le staff. A nous de bien l’encadrer, l’entourer, le guider. S’il est bien dans la tronche il sera très performant sur le terrain, ça a toujours été comme ça avec lui. C’est un joueur différent et c’est bien qu’on puisse le revoir dans le championnat. J’envisage de le faire jouer à son poste, attaquant de pointe. Il est important de montrer à notre public que l’on est ambitieux en prenant des joueurs internationaux. » expliquait ainsi le technicien breton venu de Guingamp quand Jérémy Ménez s’est engagé en faveur du club au scapulaire.

De là à dire que Ménez, avec sa carrière, son profil de jeu et… son salaire (on parle de plus de 200 000 euros par mois), est un joueur lambda de l’effectif, il ne faut pas pousser. Mais force est de constater que, si on attend, effectivement, plus de régularité, d’implication, d’influence dans le jeu et de gestes décisifs de sa part, le natif de Longjumeau ne sera pas le messie girondin et n’est donc pas particulièrement en retard par rapport à ce qu’il faudrait pour que son recrutement devienne un succès. Il serait quand même enfin temps, pour lui comme pour toute l’équipe, de passer la seconde vitesse, car on ne se contentera plus très longtemps d’espérer du mieux et d’être bienveillants. Certains y ont même déjà renoncé, depuis longtemps déjà.