Willy Sagnol revient sur ses années Bayern et sa fin de carrière de joueur

Pour RMC, encore une fois, l’ancien entraîneur des Girondins de Bordeaux, Willy Sagnol, reparle de sa belle carrière de joueur, surtout marquée par un long passage au Bayern Munich (2000-08) :

« Ma longévité en Bavière et ma relation avec le public ? Il faudrait leur poser la question. Moi, j’ai essayé de, comme à Sainté et à Monaco, leur faire honneur en me donnant à fond. Alors, j’ai aussi parlé Allemand assez rapidement et pour eux ça a été une grande chose, comme le fait que j’aimais bien porter la culotte de peau, même quand il n’y avait pas d’évènements spécifiques (rire). Et puis rien que mon prénom… Je m’appelle Willy, comme Willy Brandt (un ancien politicien allemand, NDLR). C’était un ensemble de choses. Puis, sur le terrain, ça se passait bien, donc on a vite accroché. Le Bayern Munich, tout le monde ne peut pas y aller, mais quand ils vous prenaient ils faisaient vraiment tout pour qu’on se sente bien : toujours avec des objectifs de performances élevés, bien sûr, mais ils étaient derrière vous. Il y avait une âme, c’était une grande famille, on s’y sentait bien et donc on n’avait plus envie d’en partir.

J’avais l’impression d’être un joueur important, mais pas une star. Ce mot, il est tellement bafoué aujourdhui, et je ne l’aime pas. On arrive même à faire des émissions avec le mot star dans le titre mais où on ne connait pas les personnes dedans (rire). (…) Mon surnom de ‘Dieu des centres’ ? Ouais, il pouvait y avoir pire (sourire)… Mais, je les travaillais beaucoup, oui, et tous les jours, après les entraînements : 20, 30, 40. C’était important pour moi et pour Ottmar Hitzfeld, l’entraîneur de l’époque. Bixente Lizarazu ne le voyait peut-être pas ce travail, car lui était plutôt en salle de musculation, mais moi je détestais ça ; la muscu (rire) ; alors quand lui rentrait à la muscu moi je restais faire des centres.

(…) La Juventus de Turin ? Oui, j’aurais pu y aller. En 2005, quand je suis en pleine maturité mais à un an de ma fin de contrat, des grands clubs me contactent : Manchester, des Espagnols aussi, le Milan… Et la Juve m’approche, à une période hors mercato, pour qu’on se mette d’accord et que je les rejoigne en 2006, libre. Le Bayern savait que j’avais eu des approches, mais Uli Hoeness, qui était alors manager général, ne perdait pas espoir de me faire changer d’avis tant que rien n’était signé. Alors la direction m’a fait, comme on dit dans le jargon, un chèque en blanc, pour que je reste. On m’a tendu un bout de papier et on m’a dit : ‘Mets ce que tu veux’. Là, le Willy Sagnol d’origine paysanne et issue d’une famille pas pauvre mais populaire, il n’était pas à l’aise. Ils ont accepté le chiffre que j’ai mis, mais c’était un chiffre pour les dissuader. En fait, là, je m’étais projeté sur un nouveau projet, et je ne voulais tellement pas leur dire non – après tout ce que j’avais vécu avec ce club -, que j’ai tenté un coup de… pas de bluff, mais… Je savais que ce n’était pas dans la culture Bayern, à cette époque, d’investir autant sur un joueur, mais tout était dans le bon timing avec les supporters qui voulaient que le club fasse tout pour me garder et un marché où il n’y avait peut-être pas beaucoup d’arrières droits de très haut niveau. Alors tout était de mon côté et j’ai eu de la chance.

(…) Par contre, il a fallu aller dire ça à la Juve (rire), à Turin, dans la maison de Luciano Moggi, le directeur général… Avec mon agent on est donc allé leur dire qu’on ne venait plus. Il y avait Fabio Capello, l’entraîneur, qui parlait un Français correct et m’a dit quelque chose que j’ai très bien compris (rire) et qui n’était pas très sympa. Je suis allé leur dire, en janvier, que j’avais finalement fait le choix, depuis nos discussions d’octobre, de rester au Bayern, que je m’excusais – car dans ces cas, on doit s’excuser -. Ils m’ont fait comprendre qu’on ne disait pas non à la Juve, que ça pouvait avoir des conséquences, etc. Mais, heureusement, un autre dirigeant, Roberto Bettega ; une personne fabuleuse ; était là, et il a calmé tout le monde en disant qu’il comprenait que je veuille rester dans ma famille. Puis on a mangé des pâtes et je suis rentré. Après coup, certains ont dit que je savais que la Juve allait être rétrogradée en D2 pour les matches truqués, en 2006, mais non, je n’en savais rien (rire).

(…) Ma fin de carrière, en 2009 ? Ce n’était plus possible de continuer et ça faisait depuis 2002-03 que j’avais mal au genou, constamment. L’équilibre, la balance, entre le plaisir et la douleur, ça a penché au bout d’un moment du côté de la douleur et ce n’était plus possible. Arrêter à 32 ans, ça ne m’a pas du tout fait mal, car toute chose à une fin et que j’ai aussi eu la chance d’avoir une carrière riche, dont j’étais très fier. Je voulais aussi que les gens gardent l’image d’un joueur se battant et qui voulaient bien faire les choses en essayant d’honorer les différents maillots qu’il a portés. Je voulais mettre un point d’honneur à partir sur ça, alors qu‘au Bayern on me disait de continuer mais que j’allais moins jouer et que ce n’était pas grave si j’étais moins bon. Mais je ne pouvais pas, non, c’était trop dur, impossible à accepter. J’avais une telle relation avec les supporters du Bayern que je ne pouvais pas leur donner ça en échange. Si j’avais eu le choix d’arrêter, je pense que ça aurait pu être une ‘petite mort’ comme chez certains, mais moi je n’ai même pas décidé, c’était un soulagement physique et même psychologique, car se lever tous les matins en ayant mal était dur et au bout d’un moment je n’en pouvais plus. »

Retranscriptions faites par nos soins du podcast de ‘La boîte à souvenirs’