« SBA n’a pas bien analysé ce qu’était le monde des tribunes »

En complément des autres propos déjà retranscrits concernant le sentiment des Ultramarines après la grande réunion sécurité du Nouveau Stade de Bordeaux faite vendredi, notre invité, Florian, a été interrogé sur la relation du principal groupe de supporters bordelais avec la société Stade Bordeaux Atlantique (SBA). Cette toute jeune société, filiale des constructeurs VINCI et FAYAT, est chargée de l’exploitation de la nouvelle enceinte girondine, comme stipulé dans le Partenariat Public Privé choisi il y a plusieurs années pour son financement et sa construction. Et d’après ce que nous a bien dit notre interlocuteur (le podcast complet de son interview est ICI), il y a une très forte incompréhension de fond – même si de bons rapports dans la forme visiblement – avec ce nouvel acteur entré dans la vie des Girondins de Bordeaux.

« Avec SBA, c’est plus qu’un choc de culture. Ce sont des gens très gentils, Mr Fondacci (président de SBA NDLR) est vraiment très aimable. Nous avons aussi fait connaissance avec le nouveau responsable sécurité. Il y a eu plusieurs réunions et de nombreuses visites du stade, toujours dans la courtoisie, l’écoute, le bon accueil – aucun souci là-dessus -,  ils prennent bien le temps de parler avec nous… Mais on s’aperçoit qu’ils ne connaissent pas le monde des tribunes. Vous l’avez bien vu vous aussi. Quand on nous dit que les sièges tiennent à l’Emirates Stadium d’Arsenal et que donc c’est bon, c’est une preuve flagrante d’incompréhension du monde des tribunes en Europe. Ils n’ont pas du tout analysé que l’Angleterre a lutté contre le hooliganisme de manière radicale en faisant une vraie sélection par l’argent, que le prix d’un abonnement à l’Emirates c’est 1 500 euros et que le peuple n’y va donc plus beaucoup. A la télé, oui, certes, on a l’impression qu’il y a de l’ambiance car sur les corners, les touches, ça se lève et ça vit un peu, mais les gens vont vite se rasseoir. La sélection par l’argent, et aussi le fait que leur mouvement supporter ait été beaucoup plus du hooliganisme mais pas du supportérisme organisé, ça empêche l’ambiance comme ailleurs, en France, en Italie ou bien en Allemagne. Dans ces pays là, il y a des personnes qui lancent les chants, qui font des tifos, et ça l’Angleterre ne le fait pas. Donc quand Mr Fondacci prend Arsenal en exemple, ce n’est qu’une confirmation de ce qu’on sait déjà, il ne connait pas le monde des tribunes. Toutes les réunions avec SBA, ça a été ça. Ils n’ont pas bien analysé ce qu’était le monde des tribunes. Pourtant, on les avait invités à venir passer quelques matches avec nous.

(…) Mais ça nous embête quand même un peu de « taper » sur Dominique Fondacci car le pauvre ne s’est sûrement même pas rendu compte de la maladresse de ses déclarations. Il est réellement très sympathique. (…) Avec SBA, les relations se construisent, mais c’est désarçonnant de parler à des gens qui ne savent même pas ce qu’est un tifo, qu’il faut bâcher, qu’on va se mettre à sauter. C’est un peu compliqué, mais pour l’instant l’essentiel est sauf : on peut faire des tifos, bâcher, la tribune en 5 blocs est très belle… Tant qu’on est entendu, écouté, et que les fondamentaux sont saufs pour garder une tribune populaire, ça nous va. Après, tant mieux que les réunions soient vivantes. On y est habitué à la longue…

(…) Quand je vois le communiqué de la préfecture, je me dis vraiment que toute l’organisation d’Adieu Lescure et le travail pour animer ça bénévolement et montrer notre crédibilité en organisant une manifestation de 8 000 personnes sans qu’il y ait de problème à part des bières écrasées par ci par là – et encore -, et bien ça n’a servi à rien au moment où on vient expliquer les problèmes, bien flagrants, que l’on rencontre. A la réunion sécurité à la préfecture on nous a dit « Certains on fait exprès de casser ». C’est le président Triaud qui l’a dit. On lui a répondu que oui, peut-être – on n’allait pas dire le contraire -, certains abrutis on dû casser des sièges, mais sur les 50 sièges cassés on est sur du 10%, au maximum. Là n’est pas le problème. Les abrutis on saura les gérer, on sera plus vigilants pour pas que 2-3 personnes ne cassent 5 sièges volontairement. Mais ça n’empêchera pas que sur les mouvements de foule, des sièges peuvent se briser et devenir ainsi des objets qui peuvent blesser ou tuer ! Il faut réfléchir au-delà de 2-3 abrutis.

(…) Le communiqué de la préfecture nous met en colère. La préfecture n’a pas d’intérêts financiers à nous accuser. C’est au-delà des Girondins, du foot, du mouvement supporter. On touche à notre honneur individuel. Si demain, une personne est blessée gravement à cause de ces sièges et qu’on a mis dans la tête des gens que ce sont les Ultramarines qui les cassent volontairement et qui s’y amusent, je n’ai pas envie de voir jusqu’à la fin de mes jours dans les yeux des gens que je suis responsable. C’est quand même grave de dire ça ! On a beau me dire que je ne suis pas visé personnellement, mais quand on touche le Virage Sud, c’est moi qu’on touche aussi. J’admets 2-3 abrutis, on va savoir qui ils sont, mais « des groupes de supporters déterminés à commettre des dégradations » (les termes du communiqué NDLR)… On croit rêver ! On veut faire croire ça à qui ? Nous, notre tribune, on la contrôle, on sait qui est dedans. Chaque « capo » a observé la tribune pendant tout le match et on a identifié des abrutis isolés, mais parler de « groupes de supporters » c’est une insulte adressée à la tribune, aux Ultramarines, et aux 8 000 personnes présentes à Adieu Lescure place de la République le 9 mai. Ce n’est peut-être pas ce qui a voulu être dit, mais nous sommes obligés de le prendre comme ça. S’il y a des incidents par la suite, avec la Serbie ou plus tard, on refuse d’être jugés responsable de ça, que les choses soient claires.  Ils ne pourront pas venir nous dire qu’ils ne savaient pas les risques. »