« Il n’est certainement pas beau, mais il ne ressemble à aucun autre »

Superbe initiative du site d’Eurosport qui a, en deux parties, publié des récits de supporters des Girondins (mais pas que) racontant leurs histoires vécues avec le Parc Lescure autour des matches du FCGB qui y ont été disputés. Du plus « banal » souvenir d’enfance d’une victoire dans un (grand) match à certaines anecdotes savoureuses et/ou récits énamourés, des hommes et des femmes d’âges divers, simples fans de football, partagent ainsi leurs meilleurs moments dans une enceinte qu’ils auront tous aimée.


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« 19 mars 1996, 18 heures. Ma mère vient me récupérer beaucoup plus tôt que d’habitude chez mon ami d’enfance, chez qui je passe alors toutes mes soirées après l’école (j’ai 9 ans à l’époque). Au cours du trajet du retour (je me rappelle encore du lieu exact où elle m’annonce cela), elle me dit que je dois me changer. Étonné d’abord, je comprends très vite devant toute son insistance et son sourire à peine dissimulé que mon père m’emmène pour la première fois à Lescure, voir Bordeaux affronter le grand Milan ! Les frissons, l’excitation, la boule au ventre sont encore présents au moment d’écrire ces lignes.

Les abords du stade, la file d’attente, la découverte de la pelouse et des énormes projecteurs, je n’en ai presque aucun souvenir. Toutefois, le grand rêve d’exploit, l’espoir de gagner, tout ça se ressentait ce jour-là. L’ambiance enivrante après le premier but de Didier Tholot (sur une frappe ratée que je revois encore), et les encouragements pour pousser Zizou sur le 3e but, sont bien présents dans mon esprit. Mais rien ne pourra jamais remplacer cette anecdote qui me fait toujours sourire.

A quelques minutes de la fin du match, voyant tout le monde tendu et stressé, alors que j’étais aux anges, je pose la question fatidique : « Papa, pourquoi tout le monde a peur alors qu’on gagne 3-0 ? ». La règle du but à l’extérieur, c’est ce soir-là, à environ cinq minutes de la fin de la rencontre, que je l’ai découverte et comprise. La réponse de mon père m’a alors fait basculer avec les 35000 autres spectateurs, et j’ai vécu mes premières minutes de supporter stressé. Pour exploser de plus belle au coup de sifflet final.

Pour une première, mon père a plutôt eu le nez très creux… Un jour, j’espère emmener mon fils au Nouveau Stade : le défi est de taille pour dépasser la joie connue lors de cette soirée !!! »

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« Il m’est bien difficile de choisir un seul souvenir du Parc Lescure. Beaucoup me viennent en tête, chacun rattaché à ce qu’était ma vie à ce moment-là. Alors prenons le dernier, cet ultime Bordeaux – Marseille qui tient tant à cœur de tout supporter des Girondins. De match en match, d’année en année, la fierté de garder Chaban imprenable face au grand rival, la hantise de voir l’invincibilité tomber en sa présence sont patiemment intériorisées. Alors, ce 12 avril, autant dire qu’il était noté depuis longtemps dans un coin des têtes

J’allais à ce match accompagné, notamment, d’un ami néophyte et pas supporter girondin. En entrant dans le virage sud, je lui demandais ce que ça fait à un Breton de voir un vrai stade de football. Et lui il me répond, à ma surprise, même si le chambrage était attendu : « Mais il est moche ton stade ».

Et à la réflexion, est-il beau, ce stade ? Avec ses travées grises, son béton délavé, ses strapontins d’un blanc-beige sans âge, ses deux virages si à l’horizontal qu’on se trouve bien loin du terrain, ses deux vigies délabrées suspendues aux coins du toit… Et pour couronner le tout, quand il est plein, cette couleur bleu marine, élégante sur chacun, mais qui fondue dans une foule devient une masse sombre. Ah le virage sud, même plein à dégueuler, quand on ne peut que deviner le mur qui sépare le bas et le haut de la tribune, n’aura jamais l’air du Gelbe Wall du Westfalenstadion.

Mais pour moi, ce virage et ce stade ont quelque chose d’unique. Il n’est certainement pas beau, mais il ne ressemble à aucun autre. Vu du ciel, il se fond dans la ville, et son toit, vétuste, prend des allures antiques avec ses arcades art-déco, son arche et sa flèche inutiles. Et puis, ce stade, ça a d’abord été un rêve: je le voyais à la télévision, je le reconnaissais sans y être jamais allé. J’imaginais y mettre enfin les pieds. Le gamin que j’étais se renseignait, en apprenait les faits d’armes… Il en devenait peu à peu un habitué. »