Girard : « Avant de dire n’importe quoi, il faudrait prendre en compte mon palmarès »

Entraîneur du FC Nantes depuis cet été, l’ancien milieu défensif des Girondins dans les années 80, René Girard, sait qu’il aura du travail pour que l’opinion publique change d’avis sur lui, notamment du côté de la Loire-Atlantique. Mais l’ex coach de Montpellier et de Lille ne se prend pas la tête avec son image et a confiance en lui pour réussir son nouveau défi, probablement le dernier de sa carrière.

« Je suis au courant de la pétition des supporters faite contre ma venue et du #TousSaufGirard, mais je n’ai pas lu. Je ne tweete pas et je ne suis pas un follower comme on dit maintenant. Je ne fais pas partie de cette génération-là. Je ne sais pas du tout qui est derrière cette pétition. Et je ne m’en préoccupe pas. C’est marrant, ces réactions proviennent de jeunes gens qui ne m’ont pas connu en tant que joueur et qui restent sur des qu’en dira-t-on. À cette liste, on pourrait ajouter Montpellier. Quand j’y suis arrivé, en 2009, j’ai aussi rencontré des supporters énervés car j’étais perçu comme le Nîmois qui débarquait dans l’Hérault…  Je n’y attache pas d’importance. Ce qui m’importe, c’est le travail que je fais et comment je le fais. Le reste, c’est s’amuser à faire monter la sauce un peu gratuitement. J’y suis attentif, j’aime bien rencontrer les gens, je peux m’expliquer avec eux et leur demander ce qui peut motiver leurs réactions. Mais cela ne me touche pas plus que ça. Peut-être que j’ai une image de dur alors que je suis quelqu’un de très ouvert. Mais c’est la vie. Quand on vous colle une étiquette, vous la gardez toute votre carrière… Je ne me reconnais pas du tout dans l’image que l’on veut donner de moi. Je le prends de qui ça vient. Cela ne me perturbe pas et ne m’empêche pas de travailler. Cela me gêne plus pour ma famille et pour les gens qui me connaissent bien et qui savent qui je suis que pour moi personnellement.

Je suis quelqu’un d’entier qui exprime les choses et n’a pas envie d’entrer dans du « circus ». S’il faut inviter tous les jours un journaliste à manger pour être bien avec lui, eh bien, ce n’est pas pour moi ! Si j’ai envie de dire merde à quelqu’un, je le dis. Après est-ce que c’est bien ou pas ? Est-ce qu’avoir du caractère c’est forcément avoir mauvais caractère ? Je n’en suis pas persuadé. Au contraire, je souhaiterais rencontrer beaucoup plus de gens comme moi…

(…) En venant ici, je découvre un club qui était dans l’adversité mais si j’étais né à Nantes, j’aurais peut-être été un joueur nantais. On essaie d’apporter ce qu’on sait faire et on sait qu’en même temps on est sur une terre de football. Le FC Nantes, c’est quand même quelque chose. J’ai beaucoup de respect pour ce club et je crois qu’il faut se servir du passé. Mais je n’ai plus l’âge d’être écrasé par ça, au contraire. Le football évolue, il est difficile de réaliser aujourd’hui ce qui se faisait il y a trente ans. Les jeunes partent très tôt, c’est compliqué de garder une identité. Contrairement à ce qu’on a pu dire, les projets avec les jeunes m’intéressent énormément et j’ai fonctionné comme ça avec Montpellier. La plupart de ces gamins pourraient être mes enfants. Ils m’amènent de la fraicheur, à moi de leur donner de la rigueur. J’aimerais qu’ils deviennent des winners. Je leur ai dit d’entrée. Un club comme le FCN doit s’appuyer sur eux.

Le football professionnel, c’est quoi ? Moi, Coubertin, je n’y crois pas trop. Il y a vingt clubs en Ligue 1 et tout le monde veut être dans les dix-sept qui vont se maintenir. Mais on ne finit pas champion de France en faisant n’importe quoi et en mettant n’importe quel football en place. L’année du titre avec Montpellier, on finit troisième meilleure attaque et meilleure défense avec un Paris Saint-Germain en train de grandir. Sur les six dernières années, j’ai fait trois fois dans les cinq premiers. Un entraîneur écrit des lignes et derrière la vie continue. Je ne vais pas aller prier tous les jours la Bonne Mère pour qu’on me reconnaisse. Je le dis toujours aux joueurs : quand on regarde dans le rétroviseur, ce qui compte, c’est d’avoir existé et de laisser quelque chose derrière soi. Quand je me retourne et que je vois ce que j’ai réalisé en tant que joueur et entraîneur, c’est quand même réconfortant. Mais cela me gêne de parler de ça. Cela donne l’impression de vouloir se justifier. Avant de dire n’importe quoi, il faudrait prendre en compte mon palmarès. Et si on était objectif, on ne dirait pas tout à fait les mêmes choses de moi. Il y a des personnes que l’on adore et qui n’ont fait que du bla-bla, d’autres que l’on n’aime pas et qui ont fait des choses. Je n’ai rien réussi de grandiose, mais je suis fier de ce que j’ai fait. J’ai la chance de n’avoir jamais été lâché par mon groupe. C’est ça qui est rageant, ce n’est pas toujours la vérité qui ressort. Mais on ne peut pas passer sa vie à se justifier. Moi, ma façon de le faire, c’est le terrain. »