Gustavo Poyet : « Au final, j’ai tout perdu, mais il fallait stopper ces conneries »

Une conférence qui a marqué l’histoire du club et sonné la fin de l’aventure pour l’uruguayen en Gironde :

« Pour moi, les deux mois les plus importants dans l’année d’un club, ce sont ceux de l’été. Si tu fais les choses bien, tu te donnes de bonnes chances de bien démarrer. Quand je suis parti après le dernier match de la saison à Metz, on s’était mis d’accord sur les profils de joueurs. Il y avait aussi les matches de barrage d’Europa League qui arrivaient vite. Au retour, on avait prévu un stage de pré-saison. Je reviens et nous n’avons pas de nouveaux joueurs. Deux ou trois jours après, l’attachée de presse vient et me dit qu’il faut faire une conférence de presse de début de saison pour présenter le groupe, etc. Je lui réponds que non car je ne suis pas content : je n’ai pas de nouveaux joueurs, les premiers matches approchent et je ne connais rien de notre premier adversaire. Donc, non. Elle me répond qu’il faut absolument la faire. J’essaie finalement mais à ce moment, la tension se ressent. Il y avait des éléments autour de ça. Une histoire d’avion par exemple. On devait se déplacer au départ avec un premier gros avion. J’avais validé le choix. Ensuite, on me dit que cet avion, n’est pas disponible. Pas de problème. On part sur un autre. Mais au final, on me dit que ce n’est pas possible et on m’annonce trois petits avions. On avait commencé à réfléchir comment les composer. Mais j’avais dis non. On parlait de plusieurs heures d’avion et d’un long trajet, ce n’était pas sérieux pour un club de football. Ce n’était pas une sortie scolaire… On avait fermé les yeux sur ça. Mais il y avait toujours quelque chose d’étrange qui arrivait. Vous vous souvenez de Basic et Kalu arrivés tardivement ? Et Basic qui n’avait pas été inscrit sur la liste des joueurs pour la Coupe d’Europe ? Ce n’était pas sérieux, pas professionnel… Si en tant qu’entraîneur, je ne suis pas professionnel, je pars. Ce n’était pas normal. On ne peut pas dire que c’était une erreur. On ne peut pas faire ça. C’est une erreur qui peut coûter des millions. »

« On gagne le match, tout se passe bien. Cela démarre comme ça. Le Championnat arrive. Le video analyste vient me voir avec les informations de l’équipe adverse. Je commence à étudier ça. La conférence de presse arrive et j’y vais détendu, tranquille. Ensuite, c’est ce genre de moment où on te pose une question très particulière au moment très particulier. Je ne me souviens plus du journaliste qui l’avait posé mais c’est là que tout est parti. Tout ce qui s’était passé dans l’été est ressorti dans ma tête à ce moment. La question ? C’était quelque chose comme Tu ne sembles pas content alors que tu viens de gagner, que se passe-t-il ?’ À ce moment là une autre personne sous entend ce départ et de voir qu’une autre personne en sait plus que moi… S’il ne me donnait pas sa source, cela ne servait à rien de continuer l’échange. »

« J’ai fait le choix de ne convoquer que 17 joueurs. C’était important pour moi de démontrer la situation. Des regrets ? Je n’en ai pas car il y a des fois où il faut arrêter toutes ces conneries qui peuvent se passer dans une équipe. Si quelqu’un ne le fait pas… »

« Je sais que ça a compliqué ma situation notamment pour un retour en France. Si on m’appelle pour un challenge du maintien, même sans trop de moyen, si j’estime que c’est faisable, je répondrai présent avec plaisir. »

« Ce qu’il s’est passé ce jour-là ? C’est facile. Le match était tard dans la soirée et je prends la décision d’arriver le midi. À l’hôtel, il y avait une possibilité qui était d’arriver le midi ou tu pouvais venir en voiture et le bus prenait le relais. J’étais venu avec mon adjoint et on arrive au bus juste avant midi. Le délégué me donne la clé de la réception, je pars tranquille dans ma chambre… On venait de gagner, tout allait bien ! Midi et quart, ça toque à ma chambre. C’est le délégué et il me dit : On a un problème. Je lui réponds Allons Didier, on n’a pas de problèmes (rires) ! Tout va bien  ! Et il me dit Gaëtan Laborde il n’est pas là, il est à Montpellier. Je ne pouvais pas le croire jusqu’à ce que j’appelle Gaëtan. Je lui demande où il est. Je suis à Montpellier, qu’il me répond. Comment ça ? Tu joues ce soir. Non, le club m’a donné l’autorisation de partir, je suis à Montpellier. Il me passe son agent qui me dit qu’ils ont eu l’autorisation la veille et qu’ils se sont déplacés pour la visite médicale la veille au soir. Je raccroche, je dis, OK… »

« Et je m’adresse aux supporters : comment on réagit dans ce genre de situations ? Chacun réagit différemment : quelqu’un peut partir, ne rien dire, appeler le président… Mon adjoint, lui, il voulait partir ! Il était fou ! Il me parlait d’irrespect. Cette situation je l’ai affrontée en me disant qu’on allait gagner le match du soir. D’abord on jouait et après on voyait. »

« Le midi je parle avec le groupe, le capitaine, je leur dis que Gaëtan Laborde ne va pas jouer. Les mecs me regardent et ne comprennent pas ! Eh oui, c’est possible. Donc je prépare le match, on le joue et on gagne. J’aborde la conférence de presse tranquille, en n’ayant rien préparé, rien calculé sur ce que j’allais dire suivant le scénario de la qualification. C’est la question du journaliste qui me fait tourner la tête, et à ce moment, j’ai décidé de dire la vérité. Encore aujourd’hui, des personnes n’ont pas compris : j’ai seulement demandé des explications. Les gens ont dit que j’étais contre la direction, le propriétaire, etc. J’ai seulement demandé des explications.Je voulais savoir comment c’était possible qu’un joueur parte un match d’Europa League sans que l’entraîneur soit au courant de cette décision. Rien de plus. Il y avait plusieurs façons de le faire : m’appeler, me dire On a fait ça, tu n’as pas ton mot à dire. Ta gueule et continue d’entraîner. J’aurais dit OK ou ce cas de mise à pied. Une semaine, on fait quoi ? Tout le monde a assisté à la conférence. C’est un problème d’égo selon moi. Il a été devant le professionnalisme. L’égo je j’en ai pas : je n’ai rien fait pour moi car à la fin, le perdant c’est moi. Je ne suis plus à Bordeaux, trouver des opportunités en France est devenu compliqué… »

Retranscriptions faites par nos soins via GirondinsideTV