Alain Giresse : « Mon père avait dit à Mr Gérard : ‘Vous allez l’amener ? Il est jeune quand même’… »

Toujours en poste, mais dans la tourmente, comme sélectionneur du Mali, Alain Giresse, la légende bordelaise numéro 1, s’est remémoré ses tous premiers pas en professionnel avec les Girondins de Bordeaux, son club formateur où il a fait presque tout sa carrière. Avant de devenir le meneur de jeu des Marine et Blanc et puis leur capitaine, au sein de la grande équipe aquitaine des années 80, le futur ‘petit prince du Parc Lescure’ a connu des débuts classiques profitant d’une opportunité pour gagner sa place. Et ne plus la perdre.

« À 18 ans, à moins d’être un phénomène, on n’est pas dans cette logique des choses (pour faire carrière). Cette année-là, les Girondins avaient très mal démarré la saison, et pour moi cela se passait bien avec l’équipe de CFA des Girondins. Je me souviens d’un match, c’était un Bordeaux – Strasbourg, le samedi soir, où il y avait ‘Bordeaux : 1’ et ‘Strasbourg : 4’, ce qui faisait que Bordeaux était dans les trois dernières équipes du classement. Le lendemain, il y avait un match de CFA à Lescure, car ce n’était pas encore ‘Chaban’ à l’époque, et nous avons gagné le match 5 à 1. Karounga Keita avait marqué quatre buts et j’en avais marqué un, mais sur les quatre autres buts, je lui en avais fait marquer beaucoup… Alors, l’entraineur de l’époque, André Gérard, après le match, m’a dit : ‘samedi prochain, tu joues avec nous, en professionnel’.

Pourquoi ? Parce que quand vous avez pris 4 à 1, et qu’il a fait le tour, certainement, de beaucoup de choses, il s’est dit que ce jeune-là était intéressant. C’est comme ça que je le traduis maintenant, mais à l’époque je ne raisonnais pas comme ça, évidemment. D’ailleurs, mon père, qui le connaissait, lui avait dit : ‘Mais vous allez l’amener ? Il est jeune quand même’. Le match il était à l’extérieur, à Nîmes, et… heureusement que je ne connaissais pas le contexte nîmois (rire). Ainsi, on m’a lancé. On a fait 1-1, à Nîmes, qui était alors 2ème ou 3ème. Nous quittions donc la queue du classement. Et pour l’anecdote ; c’est terrible (rire) ; on était parti en train, et à la gare Saint-Jean on a pris le Bordeaux – Nîmes qui passait par Toulouse : et dans quel wagon on se trouvait ? Dans le dernier, celui qui a la lanterne rouge. Pour nous qui étions près de la lanterne rouge, c’était une anecdote assez cocasse. Voilà… Je n’avais pas très bien dormi la nuit, la veille du match, car on se dit qu’on va jouer en professionnel, donc ça tourne fort dans la tête. Et puis, en revenant de cette aventure, dans la semaine, à la reprise de l’entrainement, je me suis dirigé vers l’équipe de CFA, car je me suis dit que je revenais là où je devais être… Mais l’entraineur, Mr Gérard, m’a dit que non, qu’il fallait que je reste avec les pros. ‘Ah bon’ ? ‘Oui, tu restes là, avec nous’. Voilà. »