Dugarry : « Je n’ai pas été très exigeant dans ma carrière, ça ne m’empêche pas de l’être aujourd’hui »

Dans son émission « Team Duga », sur RMC, en début de semaine, Christophe Dugarry, échangeant avec Daniel Riolo à propos de leur vision commune de l’exigence qu’ils attendent dans le foot pro, a reconnu ne pas avoir vraiment correspondu à cet idéal quand il était lui-même joueur, et notamment aux Girondins de Bordeaux. A partir de son cas, il affirme ensuite que le premier appel en Équipe de France du jeune Kylian Mbappé arrive, à ses yeux, de manière trop prématurée dans la carrière de l’espoir offensif de l’AS Monaco, âgé d’à peine plus de 18 ans.

DR : « On dit que je suis trop critique, mais si je suis si exigeant, et Christophe aussi, c’est car on parle de football professionnel. Trop souvent, quand j’entends les autres, j’ai l’impression qu’on parle de distraction et des parties du coin de la rue… Alors, oui, pour nous, public, c’est une distraction, car on est passionnés et qu’on adore regarder du foot, et donc on peut parfois nous dire qu’on prend les choses trop au sérieux, mais on a face à nous des entreprises de très haute volée, de l’industrie de pointe, avec énormément d’enjeux financiers. On est donc obligés d’avoir un œil très pointu et exigeant quand on en parle. »

CD : « Je suis entièrement d’accord. Même si je n’ai pas toujours été exigeant avec ma personne, ma carrière, et tout ça… Mais ça ne m’empêche pas de l’être aujourd’hui. Si j’ai pris conscience trop tard ? Non, je ne crois pas, mais c’est sûr que faire les choses et en parler ce n’est pas pareil… Bien évidemment que c’est un peu différent. Mais l’un n’empêche pas l’autre. Après, oui, c’est vrai que si j’avais pu être un peu plus exigeant durant ma carrière, ça aurait pu m’aider. Disons qu’en général tu sais ce qu’il faut faire pour y arriver, mais moi c’est le contraire : je sais ce qu’il ne faut pas faire (rire). Ça peut aussi aider… »

DR : « Et même que parfois ça te plaisait… Tu n’avais juste pas envie (rire) ! Non ? »

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CD : « Oui, voilà, bien sûr, personne ne m’a obligé. Personne n’a été responsable à ma place, je te le garantis. (…) Maintenant, je me sers de mon exemple, du bon comme du mauvais, et de tout ce que j’ai eu la chance de connaître dans le foot, et aussi chez d’autres, pour parler du cas Mbappé, et de sa précocité. Moi aussi, j’ai commencé en pro très tôt, à 17 ans, et je trouve que Mbappé est très vite exposé, trop jeune. Et, attention, je ne vous dis pas que j’avais autant de talent que Kylian Mbappé ; pour remettre les choses au clair et que personne ne s’acharne sur mes propos via Twitter… En tout cas, je pense qu’au-delà du talent qu’on peut avoir, de sa façon de s’exprimer, de ton intelligence, entre guillemets, de ton éducation, de tout cela, il y a trop de sollicitations qui arrivent d’un coup. Surtout quand on devient international. Donc même en ayant tout le talent et l’intelligence du monde, énormément de recul et le meilleur entourage qui soit, c’est dur à vivre dans la tête.

La sélection de ce garçon par Didier Deschamps n’a rien de scandaleux, elle a du sens, car il est incroyable et que c’est le futur des Bleus. Je le dis sans parler non plus de ‘génie’, on verra pour le dire… Mais je sais qu’il vivra des moments difficiles, car tous les joueurs en vivent, et j’estime que c’est trop tôt pour lui mettre la pression des Bleus. Il a d’autres échéances qui l’attendent, et cela n’a pas encore énormément d’intérêt pour l’Équipe de France qu’il y aille déjà, dès maintenant, avec les grands. On prend le risque de le déstabiliser, car on va encore plus s’enflammer sur lui s’il fait deux bonnes entrées ou, à l’inverse, dire qu’il n’a pas le niveau s’il fait deux apparitions moyennes. Ce jugement peut lui faire mal. On a tellement plus de mauvais exemples que de bons avec des joueurs de 18 ou 19 ans… Il y a plus à perdre qu’à gagner, car trop avant lui se sont cassés la figure après qu’on les ait annoncés comme les plus grands. »