Dugarry : « Moi, à Bordeaux, j’ai déjà gagné sans leader »

Hier, sur RMC, un long débat a eu lieu sur le sujet du manque de leaders, notamment en équipe de France. Et l’ancien attaquant bordelais, Christophe Dugarry, a donc eu l’occasion de développer un avis assez original sur la question, en s’appuyant sur sa carrière et ses ressentis

« Ce n’est pas forcément qu’il n’y a pas besoin d’un
leader, mais s’il n’y en a pas, on ne va pas le fabriquer, car un leader n’a
pas à se forcer. On sait que maintenant, parler de ‘leader’ c’est un peu
facile. Je trouve que dès qu’il y a des résultats qui ne vont pas très bien on
dit que c’est parce qu’il n’y a pas de leader, mais ‘leader’ ça veut tout et
rien dire
. Il y a des leaders techniques sur le terrain, des leaders de
vestiaire, des leaders de cantine (rires), des leaders d’après match, c’est
plein de choses
. Moi je suis persuadé que ce n’est pas si important que ça, et
qu’il ne faut pas se forcer car ça vient de façon très naturelle. Aujourd’hui, en
équipe de France, les choses vont bien et le capitaine, Hugo Lloris, il arrive à
pacifier les choses dans une équipe assez calme, homogène, tranquille. Les
coups de gueule, il en faut quand les choses vont mal… Donc pourquoi remettre
sur la table le sujet du manque d’un éventuel leader ?
C’est le
sélectionneur, Didier Deschamps, qui captive tout, qui attire les critiques ou
les bonnes opinions.

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(…) Comme joueur, j’ai
été pendant 8 ans en équipe de France, et il y a toujours eu des relais, comme
Didier, Laurent Blanc, Marcel Desailly, Zizou, mais je n’ai jamais eu le
sentiment qu’ils prenaient le rôle du sélectionneur, Aimé Jacquet. Après, quand
quelque chose ne va pas, les joueurs, sans être non plus des leaders
incontestés et incontestables, sont bien capables de se réunir autour d’un
projet commun en se disant : ‘Bon, les gars on se secoue’. Donc identifier
un ou deux leader(s) en disant que les choses vont forcément aller mieux parce
que eux vont assumer toute la responsabilité des choses en réglant les
problèmes, non
. Je ne pense pas que ce soit aussi simple… (…) Moi, je
préférais un leader technique de terrain comme Zidane
, qui ne parlait pas, plutôt
qu’un Deschamps, leader de vestiaire. Didier a fait une carrière
exceptionnelle, bien sûr, mais ce qui compte le plus, c’est le jeu, c’est de
savoir à qui tu donnes le ballon pour qu’il le bonifie et transforme le jeu. C’est
plus important que le mec qui ne fait que piailler sur le terrain, même s’il
est aussi nécessaire. (…) N’allez pas croire que ça existe le mec qui réunit
tout le monde quand on perd 2 à 0 et qui trouve les mots magiques pour qu’on
gagne 3 à 2
. C’est juste un truc de journaliste ! Vous demandez aux joueurs qui
a dit quoi, qui est le leader, donc forcément ils vont dire que c’est le joueur
d’expérience, comme Patrice Évra, ou bien le coach, car il faut leur faire
plaisir, mais ça sert à que dalle !
Il n’y a pas de ‘Pascal le grand frère’,
surtout en équipe de France ! (…) Excusez-moi d’avoir fait plus de 15 ans
de carrière et de savoir ce qu’on peut dire en fin de match pour répondre aux
questions de la presse et flatter les anciens, ce qui est normal. Ne donnez pas
trop d’importance à ce genre de choses.

(…) Moi, à Bordeaux, j’ai déjà gagné sans leader, à l’époque
de Rolland Courbis
. C’était lui le leader, le coach. Quand on était avec lui, c’était
lui qui prenait et donnait la parole sans qu’il y ait de relais clairement
définis et identifiés
. Après, on n’a pas gagné de titres, c’est vrai (rires),
mais on a eu des résultats. Et sans leaders. Pourtant, on avait une bonne
équipe, avec Lizarazu, Witschge, Zidane. Mais ils n’étaient pas des leaders, ce
n’est pas obligatoire d’en avoir un. Et s’il y en a un, tant mieux, mais ne pas
en avoir n’est pas une catastrophe. Il vaut mieux une grande équipe qu’un grand
capitaine
. (…) Vous pensez vraiment que Deschamps avait un charisme incroyable ?
Il avait du poids dans le vestiaire, oui, mais les mots ont un sens
. C’était un
vrai leader, aucun problème, mais il n’avait pas un charisme incroyable. Aujourd’hui, Évra ou Lloris ont dû apprendre le ‘métier’ de capitaine, car au début ils n’étaient peut-être pas fait pour cela. Ils ont appris à prendre des responsabilités, à être un peu des politiciens, à être des relais, à avoir la parole juste. »