Les Girondins doivent-ils prolonger Cédric Carrasso ?

Il porte le maillot au scapulaire depuis l’été 2009, il a disputé plus de 300 matches avec les Girondins, mais Cédric Carrasso est dans le flou concernant son avenir. En attendant des discussions avec le club et son nouveau président, qui va devoir gérer là son premier vrai gros dossier, concernant un joueur majeur de l’effectif, le débat fait rage chez les supporters.


A la question, très simple, “Faut-il le prolonger ?”, des arguments existent dans les deux sens, rendant la réponse bien compliquée.

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OUI, car :

Il est encore compétitif. Malgré quelques récentes boulettes (à Lille et contre Lorient, en Coupe de France), Carrasso (18 matches en pro cette saison, 18 buts encaissés) reste le N°1 assez indiscutable, car il apporte tout simplement plus de garanties sportives que Jérôme Prior (19 matches, 29 buts encaissés) et Paul Bernardoni (0), les deux jeunes gardiens qui poussent derrière. La comparaison statistique faite en janvier par ChroniquesTactiques.fr est d’ailleurs sans appel et permet bien d’affirmer que Carrasso reste plus performant que Prior, rassurant davantage sa défense par son expérience et faisant, aussi, certainement, plus douter les attaquants adverses.

C’est un leader. Privilège de l’âge et d’une mentalité travailleuse, professionnelle et perfectionniste, Cédric Carrasso ; bien que ne portant pas le brassard de capitaine pour des raisons internes à la vie du groupe et car le coach, Jocelyn Gourvennec, préfère le donner à un joueur de champ ; demeure un cadre du vestiaire. Certains iront même jusqu’à dire qu’il est le (seul ?) leader majeur de l’effectif actuel. En tout cas, ses prises de parole concernant l’exigence du haut niveau et son impact, aux yeux de ses (jeunes) partenaires et du staff technique, pour insuffler un état d’esprit conquérant au collectif seraient une vraie perte pour Bordeaux.

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Question d’image. En plus des deux points précédents, et même si cela y est lié, Cédric Carrasso est marqué “FCGB”. Avignonnais de naissance et formé… à Marseille, où il a pas mal joué en équipe première, remplaçant un certain Fabien Barthez, avant d’aller à… Toulouse, puis de rejoindre les Girondins, Carrasso a été parfaitement adopté par le club et les supporters. On n’imagine quand même pas qu’il soit vraiment devenu ‘supporter’ bordelais, mais son attachement au club, ses qualités, son professionnalisme et son leadership, lui valent ainsi d’être devenu, à la longue, le ‘chouchou’ des Ultramarines, qui ont noué une forte relation avec lui, dans leurs échanges avec le club, et ont publiquement fait savoir qu’ils souhaitaient sa prolongation. Également qualifié, affectueusement, de ‘Dieu’ par certains supporters (hors UB 87), Carrasso n’a donc pas le profil ; afin que l’histoire reste belle ; à quitter les Girondins de cette manière, sans se voir offrir une proposition de prolongation, alors qu’il a encore des choses à apporter, sur et en dehors du terrain, lui ‘l’héritier’ des Ulrich Ramé, Gaëtan Huard, Christian Delachet et du regretté Dominique Dropsy.

NON, car :

Il n’incarne plus l’avenir. Le constat est là ; implacable et cruel ; mais Cédric Carrasso est dans sa 36ème année. Né le 30 décembre 1981, l’international français (1 sélection, mais appelé pendant des années comme N°3 des Bleus) ne pourra plus rester très longtemps le gardien de but titulaire des Girondins. Alors, bien sûr, le poste permet parfois de jouer jusqu’à près de 40 ans, et Ramé (pour citer l’exemple girondin) l’a bien montré. Mais la raison, froide et pragmatique, voudrait que le club, du fait de la fin de contrat de son N°1 de 35 ans, tourne la page en allant recruter un autre gardien confirmé, capable de lui succéder. A moins que Prior ou Bernardoni y parvienne, dès la saison prochaine… Ce qui semble très incertain. Mais le tournant pour remplacer et saluer Carrasso, comme d’autres ont été remplacés et salués avant lui, a donc lieu cet été, et pas plus tard.

Il présente des risques de blessure. Là aussi, c’est triste à dire. Et il faut d’abord louer le travail et le mental de Cédric Carrasso d’avoir réussi à revenir, rapidement en plus, de sa rupture des ligaments croisés subie à Nantes en janvier 2016, puis de son entorse de novembre, à l’entraînement. Mais cela fait deux blessures sérieuses en peu de temps, pour un joueur de 35 ans, ayant au passage connu de telles blessures en début de carrière, déjà au genou. Le risque semble donc réel, telle une menaçante épée de Damoclès, quant à une rechute. Et on ne sait pas si Cédric pourra, alors, encore revenir. Attention à ne pas tenter le ‘Diable’ : l’année de trop en l’occurrence.

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Le prolonger serait investir à perte. Encore une fois, c’est à relier aux points précédents ; et même si on ne connaît évidemment pas son salaire exact, on se doute malgré tout qu’il est parmi les plus élevés du vestiaire, et ce depuis de nombreuses années. C’est normal vu le niveau et l’importance du joueur et du bonhomme. Sauf qu’à 35 ans, et alors que Cédric Carrasso n’est, donc, plus l’avenir, le prolonger dans une fourchette salariale restant celle d’un titulaire et d’un cadre ressemblerait à un investissement à perte ; là où cet argent – que le FCGB n’a pas à l’infini… – pourrait se placer dans le recrutement et la rémunération d’un portier plus jeune, destiné à marcher sur les traces de “Carrass’” pour plusieurs années. La rumeur Benoît Costil, dont on ne connaît pas le degré de véracité, semble d’ailleurs plutôt bien coller à ce projet, dans l’idée. Et encore plus quand on sait que le gardien rennais (30 ans cet été, 1 sélection en bleu) est… libre, lui aussi, représentant donc une belle opportunité, à moindre coût, d’anticiper l’avenir en libérant un très bon gardien, pour prendre un autre très bon gardien, plus jeune.

Un compromis est-il possible ?

Entre la passion (“Oui, il faut le prolonger, il est encore bon, c’est un leader, on n’a pas le droit de le ‘virer’ comme ça !”) et la raison (“Non, il ne faut pas le prolonger, car il est en fin de carrière, il est fragile physiquement et il coûte trop cher !“), une synthèse pourrait exister : prolonger Cédric Carrasso en tant que N°2 d’un nouveau gardien (Costil ou un autre), à des conditions salariales allant de pair avec ce statut (bien qu’il serait largement plus qu’un N°2 ‘lambda’…), et l’assurance d’une concurrence saine.

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C’est ce qui avait été fait, justement, à l’arrivée de Carrasso, pour une passation de pouvoir sage et en douceur entre lui et Ulrich Ramé. “Youl’”, en fin de contrat en 2009, avait prolongé d’un an, dès janvier, puis encore d’un an en 2010, après avoir joué plus d’une quinzaine de matches durant la saison 2009/10, du fait d’un Carrasso (âgé de 28 ans à l’époque) régulièrement blessé et parfois suspendu. Mais le parallèle est difficilement tenable avec la situation d’aujourd’hui, car les deux contextes ne sont pas égaux. D’une car Ramé était plus âgé (36-37 ans) en 2009, quand il a accepté de rester en tant que N°2. De deux car Bordeaux n’a plus du tout les mêmes moyens économiques ni le même standing en 2017 qu’en 2009 pour garder deux N°1 potentiels. Et de trois, surtout, car il apparaît peu probable que Carrasso, mais aussi son successeur anticipé, accepte(nt) ce genre de deal. En attendant, si le FCGB termine la saison avec une qualification européenne, voilà un scénario dont on a encore le droit de rêver, pour résoudre cette épineuse “guerre des goals”.

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Enfin, on relève aussi qu’hier, alors qu’on a appris que Gaëtan Poussin, jeune gardien formé au club et international U18, allait probablement se voir proposer un premier contrat pro, une nouvelle option a vu le jour et aurait été proposée par Carrasso en personne. Ainsi, le N°16 accepterait de prolonger en étant doublure mais le N°1 serait, justement, un jeune espoir qu’il couverait, et non un autre gardien confirmé. Une organisation assez curieuse, car si Bordeaux a de jeunes gardiens talentueux en réserve (et ne devrait donc pas avoir besoin d’un recruter un autre de l’extérieur…), on conçoit mal que l’un d’eux puisse être propulsé titulaire d’entrée avec, derrière lui, un “Carrass’” à l’ombre imposante qui pourrait trop facilement redevenir N°1 si le jeune venait à se ‘griller’, faute… d’expérience. Espérons donc que la direction et le staff bordelais, sauf à réellement faire confiance à Prior, Bernardoni voire Poussin, ce qui serait une solution très audacieuse, parviennent à trancher dans ce drôle de dossier, rendu encore plus complexe par le cas additionnel de Franck Mantaux, entraîneur des gardiens, dont la fin de contrat est proche et qui ne serait plus en odeur de sainteté au club. Car c’est bien au club de décider, après tout… Et vu tout ce qu’on vient de présenter, vous comprendrez donc que l’enjeu est important, et sa résolution incertaine.