Les débuts de Jocelyn Gourvennec à Bordeaux vus par des supporters guingampais

1. Déjà, 1ère question qui n’en est pas vraiment une, mais on imagine que le tirage au sort des quarts de finale de Coupe de la Ligue doit vous plaire…

ROUD BOYS : Oui et non. D’un côté, ça nous donnera l’occasion d’aller voir Jocelyn dans son tout nouveau « chez lui » plus tôt que prévu. D’un autre, Bordeaux c’est jamais facile pour nous. Suffit de voir le 1-1 laborieux chez nous. Le tirage aurait pu être pire (Paris, Monaco) mais aurait pu être bien plus facile (Sochaux, Nancy… Rennes).

EAG ACTUS : Oui et non. On est bien évidemment content d’être en quart de finale, surtout après avoir battu l’Olympique Lyonnais au Parc OL et avec une équipe complètement remaniée. On est satisfait également de pouvoir retrouver Jocelyn Gourvennec, Eric Blahic et Kevin Plantet pour cette rencontre. Cependant, on est tous très déçu de devoir se déplacer pour la troisième fois consécutive (Après Bastia et puis Lyon) dans cette compétition car le public guingampais est réellement le douzième homme du club. De plus, il nous faudra bien récupérer à la suite de cette rencontre pour bien aborder le déplacement à Lorient le samedi suivant.

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2. Vous vous attendiez à ce que la 1ère partie de saison de Guingamp, avec Kombouaré et sans Gourvennec, soit si bonne ?

ROUD BOYS : Pas à ce point. Y’a toujours un effet dû à l’arrivée d’un nouveau coach mais on pense que personne n’aurait deviné un tel début de saison. On n’a presque pas quitté le TOP 7 depuis le début de la saison. C’est du haut niveau, pour nous. On a 26 points (29 depuis, avec une victoire contre… Paris, NDLR) et on pourrait en avoir bien plus avec un coup de pouce de la chance (et si les arbitres réfléchissaient avant de sortir un rouge, parfois).

EAG ACTUS : Lorsque j’avais participé à votre émission de radio, je vous avais parlé de la grande incertitude qui régnait au sein de la communauté des supporters de l’En Avant après le départ de Jocelyn. On ne savait pas qui allait le remplacer et on avait très peur du nom de son successeur. Lorsqu’Antoine Kombouaré a été nommé, nous étions plutôt rassurés mais bon, on ne s’attendait certainement pas à une première partie de saison aussi réussie. Kombouaré travaille vraiment dans la continuité du travail mis en place par Gourvennec et c’était vraiment quelque chose de très important pour la stabilité du club.


3. À Bordeaux, pas mal de supporters commencent déjà à douter de Gourvennec, comme quoi il n’aurait pas les épaules, ses beaux discours sur le jeu seraient de la comm’, etc… Par rapport à ce que vous avez connu pendant 6 ans avec lui, ça vous inspire quoi ces critiques ?

ROUD BOYS : Qu’on les emmerde. Pardon, réflexe. Faut pas « triquiter » le Joce. Blague à part, il est comme tous les entraîneurs, il se plie au jeu des conférences de presse mais on sent bien que rendre des comptes à quelqu’un d’autre que son président et peut-être ses joueurs, ça le fait chier au plus haut point. Le discours qui compte, c’est celui dans les vestiaires.

EAG ACTUS : Bordeaux est l’un des grands clubs du championnat de France avec un palmarès qui en fait rêver plus d’un. Je comprends complètement les supporters qui attendent beaucoup plus de leur équipe par rapport aux résultats obtenus sur cette première partie de saison et aussi sur les précédents exercices d’une manière générale. Malgré ça, je pense que les supporters bordelais sont beaucoup trop impatients. Il est arrivé il y a à peine 6 mois et certains demandent presque son départ aujourd’hui. Je pense surtout qu’il paye d’une certaine manière le mauvais travail des derniers coachs bordelais ne proposant aucun plan de jeu (Tigana, Sagnol…), il y a beaucoup de choses à reconstruire au FCGB et ça ne se fait pas d’un claquement de doigt.

Depuis Laurent Blanc, JG est de loin le meilleur coach qu’a vu passer Bordeaux, donc oui, quand je vois ce genre de critiques, ça me fait doucement rire… Deux montées, une coupe de France et un 1/16 de finale d’Europa League avec Guingamp et il n’a pas les épaules ? En ce qui concerne ses discours, il tapera assez rarement sur ses joueurs devant les médias (étonnement parfois après des rencontres totalement manquées à Guingamp) mais ne vous inquiétez pas, le message se passe en interne dans le vestiaire. Sa communication vise avant tout à protéger son groupe sur l’externe, ça a toujours bien marché à Guingamp, pourquoi ce ne serait pas le cas à Bordeaux ?

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 4. À son arrivée à Bordeaux, Gourvennec avait l’image d’un adepte du 4-4-2 à plat, qui savait très bien où il voulait en venir sur la façon de jouer, mais on voit qu’il a aussi tenté d’autres schémas. C’était aussi le cas chez vous, au moins au début ?

ROUD BOYS : Il a parfois adapté en fonction de son groupe ou du score, mais à Guingamp il avait un groupe qu’il avait construit et modelé pendant plusieurs années et qui pouvait presque jouer dans ce système les yeux fermés. Il a souvent tenté des extravagances comme avec le 4-4-1- Mana Dembélé (27 matches et aucun geste décisif en 2 saisons à l’EAG, NDLR) contre Paris. C’était assez fun.

EAG ACTUS : Le système en 4-4-2 était en effet le système le plus utilisé par Jocelyn Gourvennec à Guingamp, notamment à domicile. On jouait au minimum 25-30 matchs en 4-4-2 par saison. Ça correspondait très bien à notre style de jeu assez direct, basé sur un nombre de centres vraiment impressionnant à chaque rencontre. A l’extérieur, Gourvennec jouait parfois un peu plus défensif, notamment contre les grosses écuries. Cependant sur la saison 2014/2015, il a fait une saison à moitié/moitié entre les 4-4-2 et les systèmes plus défensif (alternant 4-2-3-1, 4-3-3, 4-5-1…) car il tenait énormément a faire jouer Marveaux en 10. Malheureusement, les résultats n’étaient pas au rendez-vous et quand Marveaux s’est blessé, il est repassé en 4-4-2, et ça allait tout de suite beaucoup mieux.

Après, Gourvennec connaissait très bien son groupe, il avait des joueurs dans son effectif de Ligue 1 qu’il avait déjà lorsque nous étions en national. Comme j’ai pu le dire, il faut donc lui laisser un peu de temps pour connaître parfaitement son groupe et le façonner comme il le souhaite, notamment à travers le prochain mercato d’hiver. Donc le fait qu’il teste plusieurs systèmes sur cette première partie de saison n’est pas incohérent dans le sens où il faut les tester en matchs pour savoir lequel vous correspond le mieux. Je suis persuadé qu’un système-type va se dessiner à Bordeaux dans les prochaines semaines.

5. L’été dernier, il a eu beaucoup de poids dans les choix du mercato girondin (départs comme arrivées, surtout Toulalan et Ménez) et il veut encore en avoir cet hiver. C’était pareil à l’EAG ?

ROUD BOYS : Il aime faire des paris et relancer certaines causes perdues de la Ligue 1. Chez nous, son mercato était fait principalement l’été et celui d’hiver sert à pallier les blessures et déceptions. Mais là, il n’a peut-être pas eu autant son mot à dire qu’il l’aurait souhaité cet été

EAG ACTUS : La réponse à cette question est assez subjective dans le sens où on ne recrute pas de la même manière à Bordeaux et à Guingamp. Vous avez des arguments complètement différents des nôtres, notamment au travers de notre histoire, de nos budgets et surtout de nos cadres de vie respectifs.

Cependant, Gourvennec a toujours été très intelligent dans son recrutement, une façon de faire que je compare personnellement à celle de Christian Gourcuff, avec le recrutement de joueurs confirmés et de jeunes prometteurs venant de divisions inférieures. A Guingamp, il est très difficile de conserver ses meilleurs éléments et nous avons donc très logiquement des mercatos qui sont toujours plutôt animés. Bien sûr, il y a eu quelques erreurs de casting (Dembélé, Schwartz…) mais surtout de très belles affaires qui ont permis de faire grandir le club et de le « pérenniser » en Ligue 1 (Mathis, Kerbrat, Sorbon, Beauvue, Sankharé, Pied, Salibur, Briand…). Le président Desplat faisait confiance à son entraineur et lui laissait une totale liberté sur le recrutement du club, j’espère pour vous que Triaud fonctionnera de la même façon avec lui. En tout cas, le mercato d’été fait par Bordeaux était très prometteur d’un point de vue extérieur.

6. En plus d’avoir du mal à relancer Ménez, on trouve qu’il a du mal à faire passer un cap aux jeunes talents comme Ounas, Vada, Malcom ou bien Kamano. Il s’était débrouillé comment à Guingamp pour relancer Mathis ou Briand, par exemple, et révéler des Beauvue, Salibur, Blas, Coco etc ?

ROUD BOYS : De la patience et de la confiance, tout simplement. Salibur, par exemple, il a fait six mois sur le banc sans jouer jusqu’à ce qu’il ai le déclic. Beauvue a beaucoup joué sur le côté, et a éclaté au moment où Gourvennec l’a fait passer dans l’axe après le départ de Yatabaré remplacé par… personne.

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EAG ACTUS : Gourvennec sait parler à ses joueurs, aussi bien pour les attirer dans son club que pour les mettre en confiance en amont d’une rencontre. Briand l’avait exprimé dans son portrait, c’est le discours de Gourvennec qui l’a fait venir à Guingamp. Mathis s’est relancé sous Victor Zvunka, mais Gourvennec l’a tout de suite considéré comme le vrai leader du groupe et il a toujours été capitaine jusqu’à son départ. Une confiance dont il avait besoin après avoir été renié par le FC Sochaux.

JG apprécie également de tester ses joueurs à des postes où ils n’ont pas l’habitude de jouer, et ça marche, c’est vraiment l’un de ses points forts ! Kerbrat est un milieu défensif de formation et il en a fait l’un des meilleurs défenseurs centraux du championnat de France. Beauvue était considéré comme un ailier à son arrivée, Gourvennec l’a repositionné en pointe et tout le monde se rappelle de sa saison extraordinaire. Briand jouait ailier droit à Lyon et Hanovre, poste qu’il n’apprécie pas plus que ça. Avant sa signature, Gourvennec lui avait promis de le faire repasser à son vrai poste de formation, attaquant de pointe. Pari gagnant.

Enfin, JG est quelqu’un de très exigeant. Pour exprimer mes propos, Salibur est arrivé au mercato d’hiver 2014-2015, et n’a disputé que 5 rencontres cette saison-là car Gourvennec n’était pas du tout satisfait de son repli défensif. En tant que supporter, ça nous semblait fou de le faire jouer aussi peu, on était très frustré parce qu’on avait l’impression de ne pas exploiter le potentiel d’un diamant brut. Au final, Gourvennec avait raison, Salibur a beaucoup travaillé pour répondre aux attentes du coach et a explosé la saison suivante. Et ce sont alors tous les points que je vous ai exprimé précédemment qui ont permis de faire éclore des jeunes comme Marcus Coco ou Ludovic Blas.

7. Au final, quelles sont, pour vous, les différences entre Guingamp et Bordeaux qui vont faire qu’il va réussir ou échouer aux Girondins ?

ROUD BOYS : Un public moins patient et avec des attentes plus élevées et un président pas aussi généreux et en adéquation avec ses souhaits qu’a pu l’être Desplat.

EAG ACTUS : La différence majeure, c’est le niveau d’exigence que vous avez envers votre entraîneur et, par conséquent, la pression qui lui est infligée. A Guingamp, nous sommes un club familial où le mot « pression » ne fait pas partie de notre vocabulaire (si ce n’est pour l’apéro ;-D) et où nous sommes derrière notre club quoi qu’il arrive. Gourvennec était le patron à Guingamp, l’élément central qui a permis au club d’être ce qu’il est aujourd’hui. Ainsi, j’ai le sentiment (mais ce n’est que mon ressenti) qu’il est un peu plus bridé du côté de Bordeaux, avec un Jean-Louis Triaud qui prend beaucoup de place. Après, là où nous n’avons pas de vision avec Gourvennec, c’est dans sa façon de gérer un club avec un plus haut standing que le nôtre, avec notamment des joueurs ayant plus de renommée. L’avenir nous le dira.

Pour finir, j’ai vraiment une chose à dire aux supporters bordelais : soyez patients et ayez confiance en Gourvennec, vous ne le regretterez pas !